Si nous vivions en harmonie avec la nature, en nous inspirant de son mode de fonctionnement, nous n’aurions pas besoin d’argent. Mais il se trouve que nous vivons (encore) dans un monde où l’argent est devenu une valeur d’échange incontournable, de laquelle il n’est pas (encore) possible de se passer pour subvenir à nos besoins vitaux.
Mais puisqu’il est question ici de spiritualité, je ne vais pas y aller par quatre chemins : est-il éthiquement acceptable de recevoir de l’argent en rapport à des connaissances et des outils qui ont traits à la spiritualité et donc à l’éveil de l’être humain ?
La réponse peut varier selon les individus et les valeurs qu’ils associent à la « spiritualité ». En ce qui me concerne, je pars du principe qu’il n’est aucunement malsain d’accepter de recevoir de l’argent en rétribution des biens ou services que je propose, même lorsqu’il s’agit de… spiritualité. La valeur du don dans ce contexte est d’ailleurs reconnue dans certaines traditions, notamment en Orient où elle porte le joli nom de dakshinâ.
Refuser de recevoir pourrait même être vu comme un manque de reconnaissance accordée la valeur du geste de celui qui donne et qui a de la joie à le faire. De même, refuser d’accepter une rétribution pourrait induire chez celui qui donne le sentiment d’être redevable, ce qui doit également être évité.
Fixer un tarif qui permet d’attribuer une valeur au bien ou au service proposé n’entre absolument pas en conflit avec mes valeurs, à condition toutefois de toujours offrir la possibilité de demander une réduction à celui ou celle qui ne disposerait pas des moyens suffisants, de sorte que le pouvoir d’achat ne soit pas pour lui une source de discrimination. Offrir des biens et des services ayant un rapport avec la spiritualité uniquement à celles et ceux qui auraient financièrement les moyens de se les procurer, me semblerait totalement injuste.
Ce qui me paraît essentiel, c’est la notion de détachement et de désintéressement dans l’acte de donner, tant de mon côté lorsque je partage des connaissances et des outils à caractère spirituel, que du côté de celui qui me donne quelque chose en retour pour cela. Donner POUR recevoir en retour, qu’il s’agisse d’argent ou simplement de reconnaissance, rend l’action intéressée et elle perd de ce fait tout lien avec la spiritualité puisque celle-ci est le domaine de l’Esprit et, par là même, de ce qu’il y a de plus sacré en ce monde, puisque l’Esprit n’est autre que le Souffle divin qui l’anime et en permet l’existence.
La question n’est donc pas tant de déterminer si l’argent peut avoir sa place dans la spiritualité, mais de déterminer quel est le positionnement de l’être face à l’argent dans ce contexte. Opposer spiritualité et argent serait comme d’opposer Esprit et matière, et cela ne fait absolument aucun sens. Comment la spiritualité pourrait-elle s’opposer à quoi que ce soit, elle qui est « la matrice de toute matière », comme le disait le physicien Max Planck.
En revanche, c’est la nature du rapport à l’argent qui permet de savoir si le caractère sacré de la spiritualité est respecté ou non, en considérant avant toute chose la dynamique de la recherche du juste positionnement intérieur, celle au travers de laquelle l’être s’efforce de s’aligner sur la Volonté divine et conformer sa vie à l’Ordre naturel des choses en ce monde.
En somme, le rapport à l’argent doit s’inscrire dans la recherche de cette « sainte indifférence » qu’est l’équanimité : ni attachement, ni répulsion, ni avidité, ni aversion…