Dans une récente interview [1] , Jacques Attali a affirmé que les États-Unis n’étaient plus une démocratie ! Au risque de vous surprendre, je serais encore plus radical que lui en affirmant que, depuis belle lurette déjà, la démocratie en France comme aux États-Unis, n’a plus rien à voir avec ce qu’elle est censée être dans ses fondements : la gouvernance par le peuple.
Cela, pour la simple et bonne raison que les idéaux de la démocratie sont très difficiles voire impossibles à réaliser avec des échelles de populations aussi grandes. La démocratie représentative a été conçue pour pallier à ce problème d’échelle, mais le fait est que les représentants, une fois élus, ne demeurent pas, pour une large partie d’entre eux, suffisamment intègres et incorruptibles pour représenter fidèlement la « vox populi » (on l’a bien vu avec la réforme des retraites en France).
Dans ces pays, la démocratie prend désormais davantage la forme d’un écran de fumée utilisé par les élites (qui détiennent réellement le pouvoir) pour réduire le risque des révoltes populaires en faisant croire au peuple que c’est lui qui a le pouvoir de décider (même si des grains de sable peuvent de temps à autre venir enrayer la machine bien huilée, comme on l’a vu avec les gilets jaunes en France…).
Cela tombe sous le sens : un régime politique qui est censé donner le pouvoir au peuple, ne peut que s’opposer aux intérêts des élites, puisque la souveraineté réelle du peuple signifierait la perte de leurs privilèges de classe. En effet, pourquoi le peuple permettrait-il aux élites de bénéficier de privilèges qu’il n’a pas, lui, et à plus forte raison lorsque ces mêmes élites s’enrichissent sur son dos ?
La fabrique de l’opinion
Afin de pouvoir cohabiter avec un peuple suffisamment complaisant à leur égard, ces mêmes élites ont donc trouvé la solution idéale : l’amadouer en lui faisant croire que c’est lui qui décide, alors qu’en vérité il n’en est rien puisque l’opinion de la masse est influencée, par ces mêmes élites, au travers des médias dominants, qu’elles possèdent comme chacun le sait.
Qu’il y ait plusieurs élites aux visions du monde qui s’opposent au sein d’un même système politique n’y change rien, puisque ce sont toujours les élites qui influencent le peuple, d’une manière ou d’une autre, pour promouvoir leur vision du monde et défendre leurs intérêts.
Jacques Attali doit se souvenir de l’élection de Macron puisqu’il en fut un des grands promoteurs. Son protégé avait été omniprésent dans les médias, monopolisant quasiment tout l’espace médiatique. En conséquence, les gens ont bien davantage voté pour Macron parce qu’il s’est imposé à eux que par une adhésion à ses idées et à sa vision politique.
Je passerai ici toutes les techniques d’ingénierie sociale utilisées pour orienter l’opinion… Ce n’est pas une théorie du complot, c’est vieux comme le monde. Platon en parlait déjà dans son Allégorie de la caverne.
En résumé, l’état d’esprit des élites à l’égard de la démocratie pourrait être traduit par cette célèbre citation que je me permets de paraphraser : « On n’a rien à craindre de la démocratie, les gens voteront comme on leur dira ou comme on leur suggérera. »
Le phénomène Trump
Le cas de Trump, qui fait aussi partie des élites, est différent en cela qu’il a pu influencer l’opinion publique par les réseaux sociaux. Maître dans l’art de manier les discours simplistes et démagogiques, il sait mieux que quiconque jouer avec la peur et l’espoir, qui restera toujours le meilleur moyen de manipuler les gens.
Il faudrait être bien naïf pour croire que Trump va respecter la démocratie au sens où l’entendait Lincoln : « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. » Comme il l’a fait lors de son premier mandat, il privilégiera avant tout les intérêts de son pays si cela va dans le sens de ses propres intérêts et ceux de son clan. Et si, pour cela, il doit violemment faire taire les voix discordantes au sein de son propre pays, et écraser d’autres pays, et donc d’autres peuples, il n’aura aucun scrupule à le faire (« America first« , après tout !) Son propre peuple y trouvera certains avantages, certes, mais par effet ricochet seulement, et sûrement pas parce que c’est lui, LE PEUPLE, qui les aura obtenus après les avoir demandés.
Le mandat de Trump prendra alors la forme d’une tyrannie, qui certes pourra satisfaire le peuple sous certains aspects, mais qui générera aussi beaucoup de répressions, de tensions et de discriminations parmi tout un pan de la population. Et gare alors au retour du refoulé… que même le plus puissant des systèmes totalitaires, ne pourra jamais contenir éternellement (c’est même la cause profonde de l’effondrement de tous les empires…).
En résumé, il n’y a pas d’un côté le « camp du bien » représenté par Trump et son gouvernement et, de l’autre, le « camp du mal » représenté par tous ses opposants. La réalité est beaucoup plus complexe que cela. Les choses sont ainsi faites que ceux qui parviennent à obtenir le pouvoir doivent manipuler, corrompre et menacer pour le conserver. Or, cela n’est possible que pour une personnalité dépourvue de culpabilité et de remords, plus intéressée à conserver ses privilèges qu’à servir le bien commun. Autrement dit, seul un psychopathe dont la psyché toute entière est animée par le « struggle for life [2] « , peut se maintenir au sommet (de la pyramide).
On rétorquera à cela que la fin justifie les moyens, si elle profite au plus grand nombre. Je ne le crois pas, car selon la doctrine taoïste, un but ne peut pas être harmonieux, si la dynamique qu’on utilise pour y parvenir, ne l’est pas !
L’espoir d’un réel changement
Je suis donc plus que dubitatif par rapport aux espoirs qui sont placés en Trump, même si je les comprends forcément. Pour moi, le changement ne viendra pas du sommet de la pyramide et d’un hypothétique « sauveur » qui aurait réussi à s’y élever.
Non, système démocratique ou pas, à mon sens le changement réel viendra de la base de la pyramide, lorsqu’une masse critique d’individus aura été atteinte, qui auront compris et intégré que le changement qu’on veut voir dans le monde passe par soi-même, et que si l’on veut réellement vivre dans un monde où règne l’amour, la paix et la fraternité entre les êtres, cela commence par se libérer de la logique binaire et de celle du bouc émissaire, au sacrifice de son propre ego.
Intégrer le message du Christ, le vrai, celui des origines, et pas celui des mouvements religieux qui se le sont appropriés après sa mort et qui l’ont systématisé et institutionnalisé à des fins politiques et sociales.
Personnellement, c’est là que je place toute mon espérance !
[1] Source : https://www.dailymotion.com/video/x98r2ka
[2] Traduction : « lutter pour la vie »
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