À l’instar de ma vidéo intitulée La Voie du Milieu – Sortir de la caverne des illusions !, mes publications traitant du caractère crucial et incontournable de l’effort sur soi-même dans le contexte de la Quête spirituelle, ont suscité beaucoup de réactions qui ont donné lieu à des échanges qu’il m’a semblé intéressant de réunir sur cette page, sous la forme de questions-réponses.
J’ai pu constater à plusieurs reprises que le fait d’associer la notion d’effort à celle de spiritualité est très souvent mal perçu. Plusieurs personnes avancent l’argument que l’effort est carrément incompatible avec la spiritualité, du fait que l’effort ne peut être, selon elles, qu’un moyen de contrôle de l’ego. Il s’agit là d’une grande erreur, car l’effort « spirituel » dont il s’agit est précisément le seul moyen de neutraliser l’ego. Partant de là, jeter le bébé avec l’eau du bain en clamant haut et fort que l’effort est contre-productif peut justement faire les intérêts de l’ego puisqu’il est sûr ainsi de rester aux commandes et récupérer à son avantage la démarche spirituelle. Il faut donc préciser en quoi l’effort spirituel n’est en rien semblable à l’effort que fait l’ego pour garder le contrôle. C’est ce que j’ai tenté de faire pour dissiper les malentendus et redonner à l’effort la place qui est la sienne dans la Quête spirituelle.
Avant de les passer en revue la liste des questions-réponses, voici les articles et vidéos où cette thématique de l’effort spirituel a été abordée :
Vidéos :
Articles :
Effort ou non-effort ?
Comme nous le savons, il existe de nombreux obstacles qui rendent la démarche spirituelle difficile. Parmi ceux-ci, il y a la complexité des enseignements spirituels qui peuvent parfois sembler s’opposer...
Le sens de l'effort spirituel
Il y a une vingtaine d’années de cela, j’étais un jeune homme ambitieux. Je m’étais lancé dans des études académiques pour devenir économiste. Ce n’était pas par passion pour les mondes de l’économie...
Questions-réponses :
Cette liste de questions-réponses a été réalisée à partir d’échanges privés et publics. L’anonymat des interlocuteurs est préservé.
Oui tout à fait, vous avez parfaitement saisi le sens de l’effort dont il est question. L’accueil, de même que le lâcher-prise ou encore le détachement, l’abandon, la soumission ou la maîtrise de soi qui en sont tous des synonymes, impliquent un effort, aussi paradoxal que cela puisse paraître au premier abord. Mais en fait, il s’agit d’un effort de concentration de l’esprit ; un effort de concentration de l’attention juste, grâce auquel l’esprit se dégage du phénomène automatique de l’identification engendrant inévitablement la réaction face à « ce qui est », pour ainsi s’établir dans l’équanimité. Sans cet effort de lâcher prise, par la concentration en pleine conscience, l’esprit est emporté, captivé par l’identification aux impulsions mentales d’attachement et de rejet (les fameuses samskâra et vâsanâ), et pour cela il n’y a pas d’effort à faire, tout comme un corps chute sous l’effet de la gravité. C’est pourquoi, si on ne fait pas cet effort pour se recentrer dans cet « invariable milieu » qu’est l’équanimité (là où les impulsions contraires sont neutralisées, conciliées), alors aucune progression n’est possible sur la voie spirituelle.
J’espère qu’un jour on changera la valeur octroyée au travail et à l’effort qu’il implique. Une expression empruntée à la langue allemande dit que le « travail rend libre » (expression rendue tristement célèbre par son inscription à l’entrée d’Auschwitz), et c’est particulièrement vrai en ce qui concerne l’effort sur soi-même dans l’optique de la Quête spirituelle. Dans ce contexte, l’effort sur soi-même rend l’esprit libre de tout conditionnement, lui permettant de retrouver sa pureté édénique, c’est à dire l’état de « simplicité » qui seule rend l’Illumination possible.
Ce qui est à chercher n’est pas le plaisir en effet, mais l’équanimité, le… juste « milieu », un peu comme le funambule qui cherche à maintenir l’équilibre pour ne pas le perdre. Et cette recherche implique la concentration, qui elle-même implique un effort de volonté. Par expérience, je peux vous certifier que ce n’est effectivement pas une corvée ; c’est même tout le contraire dans la mesure où l’effort juste sur soi-même procure même une joie énorme qui vient en quelque sorte récompenser cet effort, joie qui est d’autant plus grande que l’effort n’a pas été accompli en vue de la ressentir. Ce que je remarque aussi, c’est que l’équanimité conduit à plus de fluidité, plus de désintéressement, plus de détachement dans l’action et dans ses fruits. C’est un peu comme si, en s’efforçant simplement de se maintenir dans le moyeu, au centre de la roue, celle-ci se mettait à tourner d’autant plus facilement.
Il y a une année de cela environ, j’avais fait une vidéo intitulée précisions au sujet de l’équanimité, dans laquelle j’expliquais qu’en fait l’effort juste est aussi un effort de l’esprit (que j’assimilais alors à l’ego), mais un effort qui est « aligné » sur la Volonté divine et qui ne génère donc aucun déséquilibre (et qui évite ainsi de « nourrir » les samskâra).
Lorsqu’un samskâra pénètre le champ de conscience, instantanément il y a identification au samskâra , c’est un réflexe automatique. Pour s’en détacher, se « réajuster » pour reprendre votre expression, il y a bien un effort à fournir. Je veux dire que ce réajustement implique un effort (…de concentration). Sans effort, comment ce réajustement serait-il possible ? Si l’on rejette ce samskâra , on est identifié à un autre samskâra et on emploie aussi la force quelque part, mais alors l’effort n’est pas… juste. C’est tout le symbolisme du combat entre Thésée et le Minotaure, avec la massue de cuir (symbole de la force bestiale, celle de l’ego qui rejette ou s’attache) ou de l’épée d’or (symbole de la force spirituelle, celle de l’esprit équanime).
Justement par rapport à cette notion de force en lien avec l’effort, c’est intéressant car ça va tout à fait dans le sens de l’interprétation de la onzième lame du Tarot – La Force – qui symbolise selon moi la maîtrise de soi, l’équanimité. Merci de m’avoir donné cette définition, car cela conforte mon point de vue.
Enfin, pour apporter un peu plus d’eau à votre moulin, cette notion d’effort juste (« juste », pour bien différencier avec l’effort de l’ego qui relève du contrôle…), c’est comme le funambule sur son fil qui s’efforce de maintenir l’équilibre. C’est pareil au niveau de l’esprit, soit on se maintient dans le juste milieu (l’équanimité) par l’effort de concentration de l’attention juste, soit on bascule dans l’attachement ou le rejet (identification aux samskâra) et on perd l’équilibre.
Oui, il y a bien usage d’une force… mais tout est question du positionnement à partir duquel elle s’exprime.
J’aime aussi bien l’image de la plante et des racines. On pourrait dire qu’on peut faire usage de la force pour couper la plante à sa base et utiliser également la force pour en extraire carrément les racines. C’est dans les deux cas la force qui est utilisée, mais les conséquences seront différentes. Si on assimile par analogie la plante aux samskâra, on comprendra où je veux en vernir avec cette métaphore.
Par rapport à l’accueil des samskâra, personnellement ce qui me permet de me placer dans l’équanimité très rapidement, c’est non seulement d’observer le samskâra dans sa manifestation énergétique (état d’âme, impression, vibration, c’est à dire « comment » il se manifeste dans le corps) mais également « celui » qui perçoit cette manifestation énergétique. Cela permet un détachement très efficace de cette part de soi-même qui aurait tendance à contrôler. On est là dans la pure observation détachée, qui implique bien un effort d’attention soutenu, vigilant.
J’aime aussi bien l’approche alchimique. Dans cette science, il est question de « volatiliser le fixe » et de « fixer le volatil », ou ce qui est revient au même, « spiritualiser le corps » et « corporifier l’esprit ». Cette dernière expression fait selon moi clairement allusion à la concentration de l’esprit lui permettant d’opérer un retournement de la périphérie au centre, c’est à dire de l’état habituel d’identification aux pensée qui le disperse et le rend « volatil », à l’équanimité qui le « fixe » dans l’invariable milieu.
L’effort dont je parle n’est pas l’effort pour obtenir quelque chose, pour « réussir » ou « performer » spirituellement… Cet effort-là relèverait en effet de l’ego, fondé sur les impulsions contraires (désir-aversion). Or, l’effort spirituel de renoncement dont je parle consiste justement à libérer l’esprit de cette tendance à réagir sur la base de ces impulsions contraires. C’est un effort d’observation détachée, de désidentification, de…. lâcher-prise synonyme de la véritable maîtrise de soi. Il s’agit de positionner l’esprit dans une attention particulière, dénuée de tout jugement, de toute volonté « égotique », et cela implique la concentration de l’attention, qui elle-même implique un effort. J’en veux pour preuve que sans cet effort de concentration, l’identification est maintenue et à travers elle, le contrôle. Cela se fait tout seul par contre, grâce à la force d’inertie des conditionnements mentaux. La recherche de l’équanimité est le seul moyen de libérer l’esprit de ses conditionnement, et elle implique bien un effort. C’est d’ailleurs le but recherché par toutes les pratiques spirituelles mises au point par des authentiques Libérés au cours des siècles. Diriez-vous qu’elles n’ont aucune utilité sous prétexte que l’effort est inutile (car en effet, s’il n’y a pas d’effort à faire, alors la pratique est inutile…) ?
Ce matin, j’ai trouvé cette phrase tirée des Lettres du Christ, qui constituent à mes yeux un ouvrage de référence : « Pour redevenir un petit enfant, il vous faut faire l’effort de vous dépouiller de tout votre conditionnement mental passé. » Cela est tout à fait conforme au message des Maîtres spirituels. C’est l’effort de concentration de l’attention juste dont parle le Bouddha ; c’est l’effort suprême sur soi-même dont parle l’islam (le vrai sens du mot djihad) ; c’est la recherche de l’équilibre parfait inhérent au Royaume de Dieu dont parle Jésus ; c’est l’effort pour calmer le mental dont parle Ramana Maharshi… et je pourrais vous en citer encore bien d’autres exemples.
L’effort est indispensable pour progresser sur la Quête spirituelle. Et s’il n’a pas pour but de créer directement un état d’éveil, il a par contre pour fonction de préparer le terrain pour que celui-ci vienne quand le fruit est suffisamment mûr en effet. Vous connaissez sûrement l’expression qui dit que lorsque l’élève est prêt, le Maître (intérieur) arrive… mais pour être prêt, l’élève doit bien se préparer… et cela ne se fait pas tout seul.
D’autres en parlent :
Pour en savoir plus sur ce sujet, je vous recommande ces quelques références :
- Enseignement d’Eric Tolone sur le néo-Advaita : https://youtu.be/2IQIKRGpaKE?t=7102
- Article : Le néo-Advaita démystifié
- Article : Pseudo-Advaita, fausse réalisation, faux gurus
- Ebook : L’importance de la pratique et de l’effort
- Livre : L’illumination, le Chemin dans la Jungle