Le Cours du Vivant

Cours n°48 - L’incarnation de l’Esprit

L’incarnation de l’Esprit

Théorie

Ce titre a été choisi car il évoque non seulement l’aboutissement du Grand Œuvre alchimique, mais aussi la dynamique permettant d’atteindre ce noble idéal, conformément au sage précepte de Lao Tseu selon lequel « le but n’est pas seulement le but mais le chemin qui y conduit. »

Cette expression est intéressante également au sens où elle traduit l’impératif de la quête spirituelle, qui est de vivre une spiritualité authentique, sacrée et vivante, pleinement intégrée au quotidien, donc « incarnée ». Cette démarche est aux antipodes d’une spiritualité qui considérerait la matière comme une dimension impure ou imparfaite à fuir. La dualité entre l’Esprit et la matière, comme on a pu le rencontrer dans le gnosticisme des Cathares et aujourd’hui encore dans certaines formes de néo-spiritualisme, ne peut aboutir à autre chose qu’un approfondissement du conflit à l’intérieur de soi-même, et donc à la souffrance de l’âme.

La spiritualité, dans l’absolu, n’est pas autre chose que l’amour de ce qui est, de tout ce qui est. C’est le propre de l’Esprit que d’aimer sans condition, à l’image du soleil qui diffuse sa lumière dans toutes les directions, tant sur le saint que sur le criminel, sans discrimination aucune. L’amour dont il est question ici n’est pas l’amour émotionnel, conditionnel, qui s’exprime à travers les impulsions magnétiques opposées d’attraction et de répulsion. Il s’agit de l’agapè dont parlaient les philosophes grecs, un amour inconditionnel qui enveloppe, embrasse tout, sans distinction en effet. Naturellement, si la spiritualité et cet amour pur sont une seule et même chose, rien de ce qui n’existe ne saurait être rejeté ou nié. La matière, tout comme l’âme et le corps qui en font partie, sont dignes de recevoir cet amour en chaque instant.

Croire que l’on peut atteindre le bonheur et la liberté d’être à travers la spiritualité en se débarrassant de notre condition humaine et de sa part la plus « terrestre », animale, est un leurre. L’âme et le corps ne sont pas une prison dont il faudrait s’extraire pour être « délivré » et vivre la béatitude. Le simple fait de songer aux Sages qui, dans toutes les traditions et à toutes les époques, sont parvenus à s’éveiller de leur vivant, le démontre de manière évidente.

L’expérience de la chair n’est pas une punition et encore moins une damnation. Rien de ce qui n’a été créé ne saurait être mauvais en soi. Le mal et la souffrance qui en résultent, ne sont que la conséquence du rejet de l’Esprit par l’être humain lui-même, que ce rejet soit le fruit d’une rébellion consciente ou simplement de l’ignorance. C’est bien l’être humain, par l’exercice de son libre-arbitre, qui peut décider de se fermer à l’influence aimante et bienfaisante de l’Esprit, en concentrant toute son attention sur la matière pour tenter, par ses propres moyens, d’atteindre la liberté et le bonheur par compensation. Cette démarche, fondée sur la négation de l’Esprit et donc de la spiritualité, est proprement satanique. C’est la cause de la « chute » et de la lente descente aux enfers que l’homme s’est infligé avec son rejet de plus en plus marqué de l’Esprit, rejet dont l’apogée semble aujourd’hui être en passe d’être atteinte avec le mouvement transhumaniste.

Tout miser sur le corps et l’âme en niant l’Esprit, nous a fait basculer dans le matérialisme et nous en voyons très bien aujourd’hui les conséquences dramatiques autant que les illusions. La quête spirituelle, pour qu’elle soit bien vécue, doit donc impliquer la recherche de l’équilibre entre toutes les dimensions de l’être : corps, âme et esprit. Il s’agit, pour celui ou celle qui aspire à cet équilibre, de « spiritualiser la matière ». En cette fin de cycle, c’est un défi majeur car l’humanité suit la tendance exactement opposée. En s’enlisant toujours plus profondément dans le matérialisme, c’est une « déspiritualisation » qui s’opère, donc aussi une profanation, une désacralisation de l’existence. Or, sans la perception du sacré qui devrait normalement être intrinsèquement liée à l’expérience de la vie sous toutes ses formes, l’âme se meurt. Il est donc vital pour elle de retrouver cette perception, en elle comme à l’extérieur…

La dimension sacrée de l’existence

Le sacré est une notion subjective, au sens où chacun le perçoit à sa manière et dans des conditions qui peuvent grandement varier d’un individu à l’autre. Il s’agit cependant d’une perception universelle, ce qui veut dire que tout être humain peut y être réceptif, indépendamment de sa culture, de ses croyances et de sa condition sociale. Il s’agit dans tous les cas d’une perception qui induit une réaction émotionnelle inhabituelle, puissante, dont l’effet est susceptible de provoquer une interruption momentanée du flot des pensées ainsi qu’une forme d’émerveillement face à la « magie » qui s’opère en l’instant. Cette perception suspend la raison ; elle fait plier le mental devant quelque chose qu’il n’est pas capable de comprendre ou d’analyser et qui semble le dépasser, parfois infiniment.

Cette révérence qui s’impose au contact du sacré peut survenir en présence de la beauté d’un paysage, d’un phénomène inhabituel, d’un chant ou d’une œuvre d’art, d’un bâtiment ou d’un lieu, et même de la simplicité d’un instant en apparence banal de la vie quotidienne. Quelles que soient les circonstances, l’émerveillement qui jaillit du cœur de la personne qui en perçoit la dimension sacrée, s’accompagne de l’évidence que l’existence n’est pas qu’une succession de processus mécaniques, biologiques, mais qu’elle est l’œuvre de « quelque chose » qui ne se voit pas mais dont le sacré révèle la présence ou du moins l’influence. Ce mystérieux paradoxe en présence du sacré a le pouvoir de réveiller l’espérance en le bon, en le vrai et en le merveilleux. L’alchimie subtile qui s’opère au cours de tels instants, qui peuvent être brefs ou durer plusieurs heures, transforme et guérit l’être, parfois en profondeur. La vie prend momentanément ou définitivement un autre sens. Il en découle un élan de gratitude et un désir d’en prendre soin, de l’honorer, de l’aimer.

L’émerveillement qui accompagne l’expérience du sacré éveille le sentiment de l’unité (faire « un » avec la réalité) et ouvre à l’amour, l’agapè dont il a été question plus haut. Comme une coupe, le cœur s’en laisse remplir et, en débordant, le diffuse, le rayonne. Chez l’être spirituellement réalisé, l’émerveillement est constant. C’est pourquoi il a atteint le but suprême de la vie : aimer et être aimé. Il perçoit la dimension sacrée de l’existence en chaque lieu et en chaque instant. Ce ne sont plus les circonstances extérieures qui éveillent en lui la perception du sacré, mais son propre état de conscience, devenu lui-même « sacré » par sa capacité à réfléchir en permanence la lumière de l’Esprit.

À l’image du prisme transparent, il se laisse traverser par cette lumière spirituelle et, en conséquence, sa réalité est illuminée, révélant à ses sens le sacré qu’elle recèle. Il s’agit d’un état de conscience pure, la pureté de la conscience individuelle, illuminée par l’Esprit auquel elle est totalement ouverte. Cette pureté synonyme d’innocence, qui s’observe sous la forme du silence et de l’immobilité de la conscience, se reflète à son tour dans la dimension psychique sous la forme de la béatitude. L’être fait l’expérience du royaume de Dieu – le sacré par excellence – qui est paix, joie, émerveillement, unité et amour dans l’Esprit Saint.

Dans l’esprit religieux judéo-chrétien, seul Dieu peut être associé au sacré. Par opposition, selon ce même esprit, la nature, le monde et la matière ne peuvent donc être que profanes. Cela n’est pas évidemment pas exact, car la Création n’est pas séparée de son Créateur et, par conséquent, la dimension du sacré doit pouvoir y être perçue également. Pour percevoir le sacré partout, la psyché doit toutefois être suffisamment pure ; l’être doit avoir atteint, temporairement ou de manière permanente, l’état de pure êtreté. Vivant ainsi le royaume de Dieu à l’intérieur de sa propre conscience, sa perception est illuminée par son état d’être et ce qu’il perçoit bénéficie de cette lumière. Là où les autres voient le monde à travers une structure mentale qui en ternit l’image, l’illuminé en voit la dimension sacrée et s’en émerveille.

La perception du sacré se manifeste donc en présence d’un état de pure êtreté. En vérité, cet état de pureté de la conscience est déjà là, au cœur de soi-même [1]. Nous n’en faisons simplement pas l’expérience parce que notre attention est constamment « filtrée » par la structure mentale. Métaphoriquement, nous sommes comme les vagues de l’océan qui ignorent qu’elles font partie de l’océan et qu’elles sont liées à une dimension beaucoup plus profonde, où règne un calme absolu, accessible à chaque instant. Il s’agit simplement de prendre conscience de cette dimension de silence et d’immobilité à l’arrière-plan des oscillations constantes du mental auxquelles nous avons tendance à nous identifier (identification qui a pour effet de dévier notre attention hors de cet espace de quiétude omniprésent). Sachant cela, l’invitation est simplement de changer de perception, en retournant l’attention sur l’espace de vacuité déjà présent à l’arrière-plan. C’est le véritable sens initiatique et ésotérique de la conversion : la métanoïa, un retournement, une révolution intérieure, silencieuse.

Bien entendu, cette conversion intérieure ne sera pas définitive et les conditionnements mentaux parviendront à nouveau à détourner l’attention hors de son propre centre et lui faire ainsi perdre le contact avec cette dimension immuable de silence et d’immobilité qui est notre véritable essence spirituelle. Il faudra alors reproduire le même effort de conversion pour chercher à nouveau l’état de pureté de la conscience. Dans une telle dynamique de l’effort juste sur soi-même, l’énergie de l’attention dont a besoin la structure mentale pour maintenir son emprise et nous influencer, lui est retirée, au profit de la lumière spirituelle qui peut alors produire ses effets bénéfiques sur tous les plans de l’être. C’est le principe des vases communicants : faute d’attention, le mal-être, la nervosité, l’impatience, l’anxiété, la souffrance, s’affaiblissent, alors que leurs états opposés se renforcent. À mesure que se produit ce processus alchimique de purification, la paix, la joie et l’émerveillement deviennent toujours plus présents. Au fur et à mesure que nous effectuons ce travail sur nous-mêmes, notre perception de la réalité change. La perception du sacré devient plus présente, plus évidente…

Le sens de l’émerveillement

Comme l’a écrit Erik Sablé : « Nous plongeons dans l’émerveillement comme nous plongeons dans l’extase. […] L’émerveillement est donc l’aboutissement du « Grand Œuvre », la fin de toute méditation. […] L’homme émerveillé transfigure le monde d’un coup, comme par l’effet d’une baguette magique. Car c’est réellement de magie qu’il s’agit. Grâce à l’émerveillement, la vie s’enlumine de cet or toujours présent dont nous exilent les ombres du quotidien. L’émerveillement change notre perspective. Notre existence qui semblait s’écouler dans une direction unique, s’ouvre. Une autre dimension se révèle. Notre regard s’élargit. Avec l’émerveillement, les objets les plus ordinaires deviennent étranges. Ils sont comme auréolés de mystère. Ils prennent un aspect flottant qui n’est pas le leur habituellement. Pour l’œil émerveillé, rien n’est commun. Même l’arbre, devant la fenêtre, que je vois tous les jours, fait partie d’un espace neuf, magique. Comme si je le regardais pour la première fois [2]. »

Il est intéressant de faire remarquer qu’au terme du Grand Œuvre alchimique, l’être qui incarne pleinement l’Esprit est en effet placé dans un état d’émerveillement constant. Cela est dû au fait que la conscience individuelle, libérée des tendances contraires, est stabilisée dans l’état de pureté et d’innocence [3]. Le silence et l’immobilité qui caractérisent cet état d’équanimité parfaite de la conscience, rend la psyché perméable à l’influence spirituelle de l’Esprit, sans que son illumination ne lui fasse perdre de vue les phénomènes qui surviennent dans la réalité de l’instant.

Pour que Dieu ou l’Esprit puisse faire son œuvre et élever la conscience dans l’état d’émerveillement sans que celui-ci ne soit suscité par le monde extérieur, il est nécessaire que l’être ait pu suffisamment purifier sa psyché. Au sens alchimique, la conscience individuelle doit devenir de l’or, à partir du plomb, qui symbolisait l’ego en tant que « je séparé », ce faux moi dont l’état de conscience était constamment déterminé par le jeu des impulsions contraires de désir et d’aversion.

Ayant pu ainsi syntoniser sa conscience sur la fréquence de la lumière la plus pure, l’être voit pour ainsi dire la « vie en rose » et l’existence peut alors laisser transparaître sa dimension sacrée, sans discontinuer. La réalité n’est plus perçue à travers le filtre mental teinté par les tendances contraires, mais à travers une conscience mentale illuminée, un esprit « simple », « pauvre », maintenu équanime en toutes circonstances. Le prisme étant devenu transparent, le monde sensible peut à son tour réfléchir la lumière rayonnée par la conscience, sous la forme de l’amour sacré. Souvenez-vous à ce titre du témoignage de Patrick Mel [4] qui, dans cet état d’émerveillement total, voyait l’amour partout, pas uniquement sous la forme d’un sentiment de félicité, mais aussi d’une énergie pure remplissant tout l’espace ainsi que lui-même, vision béatifique grâce à laquelle il put comprendre l’absolue perfection de la réalité.

Lorsqu’un être est parvenu à un tel degré de pureté, ou qu’il vit temporairement un état de grâce, le sacré s’impose à lui et transfigure son rapport au monde. L’émerveillement qu’il vit l’invite au respect de la vie sous toutes ses formes, donc à l’amour. La vie elle-même devient une expérience sacrée au sein de laquelle l’amour jaillit du cœur et détermine les pensées, les paroles et les actes de l’être. Dans un tel état de conscience, la contemplation n’est plus le fruit d’un effort d’attention. Tout est devenu fluide, simple, naturel et spontané. L’émerveillement qui accompagne un tel état de grâce se suffit à lui-même, ce qui veut dire que l’être peut agir dans le détachement total des fruits de ses actions.

La profanation du sacré

Bien évidemment, la faculté de voir le sacré partout et d’être émerveillé en permanence ne se rencontre pas fréquemment chez nos semblables. C’est l’apanage des saints, des mystiques et des éveillés. Chez le commun des mortels, l’expérience du sacré est conditionnée par le contact de la conscience avec la beauté saisissante d’un paysage, la magie d’un lieu exceptionnel ou l’harmonie d’une nature préservée.

Au vu de l’état du monde actuel, de plus en plus profondément enlisé dans le matérialisme outrancier, on comprend que le sacré soit une « espèce en voie de disparition », du moins aux yeux d’une conscience ordinaire qui aura bien évidemment plus de mal à le déceler au cœur d’une usine ou d’un centre-ville hyper pollué où le bruit assourdissant des moteurs se mêle aux odeurs de gaz d’échappement ainsi qu’à la laideur des bâtiments et des antennes-relais.

Car il faut comprendre que le sacré n’est perceptible que là où l’Esprit et la matière ont pu se rencontrer pour produire l’harmonie, l’ordre et l’équilibre. Quand un lieu saint tel qu’une mosquée, une synagogue ou une cathédrale, touche le cœur des êtres et rend leur conscience perméable au sacré, c’est probablement parce que l’Esprit a inspiré les bâtisseurs qui les ont érigés et que ces lieux sont « chargés » de pensées élevées, d’admiration, de dévotion, de prières désintéressées empreintes d’amour et de compassion.

Sans ignorer les dérives des grands systèmes religieux, il faut reconnaître qu’ils offrent encore cette possibilité du contact avec le sacré, notamment à travers leurs lieux saints. Cela est dû à la fonction même de la religion, qui est de « relier » l’âme et le corps à l’Esprit, à travers le sacré très précisément. C’est la raison pour laquelle la nature, où le sacré est si souvent « palpable » (là où l’homme moderne n’a pas perturbé les équilibres…), peut pour certains se substituer à la religion pour relier à l’Esprit. Même de grands théologiens avaient reconnu cela, comme Bernard de Clairvaux par exemple, aux yeux duquel la nature était plus importante que les livres [5].

Malheureusement, tout comme les lieux saints, la nature subit les conséquences d’un paradigme centré sur la matière. Comme le matérialisme s’oppose à la spiritualité, l’Esprit y fait défaut, et par voie de conséquence, le sacré également. En vérité, le matérialisme se contrefiche du sacré et le voit même comme une menace qu’il faut ridiculiser et détruire pour faire avancer sa cause. De nos jours, il a pris une telle ampleur que sa tendance à tout désacraliser semble s’être infiltrée jusque dans ces derniers remparts du sacré que sont les temples et les églises. S’y donner en spectacle dans des tenues provocatrices, en y tenant des propos volontairement blasphématoires, comme le font certains, peut certes trouver sa raison dans la volonté de faire un pied de nez aux systèmes religieux eu égard à leurs dérives, mais il est déplorable que la première victime soit le sacré lui-même, qui n’est pourtant nullement en cause. 

Mais il y a plus grave encore ! Si le corps est le « temple de l’Esprit [6] », comme l’a proclamé Saint Paul, alors le sacré est également profané par l’idéologie matérialiste au cœur même du vivant [7]. Par exemple, modifier le « logiciel de la vie [8] », comme le font Big Pharma et l’industrie agroalimentaire depuis des décennies, peut en effet être considéré comme une profanation. Aussi, au nom de nobles idéaux en apparence, il n’est plus seulement question de faciliter la vie des personnes handicapées grâce à des prothèses, mais de créer un « homme augmenté » en introduisant directement la technologie dans le corps. Si l’on considère que ce dernier est le temple de l’Esprit et qu’il est sacré pour cette raison, alors on conçoit bien à quel point la science moderne se rend coupable de profanation sous couvert de progressisme.

L’analogie entre la profanation des lieux de culte, de la nature et du corps humain, est ici évidente…

« Je qualifie aujourd’hui de délire inhumain ce concept d’une vie qui serait assimilable à des data, qu’il faudrait traiter entre l’informatique et la génétique, en vue d’un « humain augmenté ». […] J’ai compris que cette croyance trahissait l’énergie du désespoir d’une technoscience à bout de souffle, qui ne peut que se heurter durement à la réalité, et notamment celle de notre réalité biologique [9]. » Alexandra Henrion-Caude

Le diable porte pierre

En fin de compte, c’est tout ce qui porte encore la marque du sacré en ce monde qui est visé par le matérialisme, qui démontre ainsi que sa démarche est purement et simplement… satanique.

À y regarder de plus près, n’est-ce pas exactement ce qui se passe actuellement dans le monde ?

Cela est particulièrement visible dans le domaine artistique, où les créateurs vont toujours plus loin dans la provocation, la débauche, le blasphème, l’immoralité et la laideur. Cette surenchère s’observe également sur le plan des valeurs morales, où l’on observe une véritable inversion par rapport à certains principes et archétypes fondamentaux, toujours sous couvert de nobles idéaux tels que l’égalité, la liberté et le sacro-saint progressisme. S’il s’agit bien entendu de réduire les inégalités et de dénoncer les injustices sociales, il faut prendre garde de ne pas édicter de nouvelles normes et valeurs morales qui obligent la majorité à se restreindre et à se culpabiliser pour s’adapter aux minorités. Autrement, au nom de la défense de la diversité, on finit par opérer un nivellement par le bas qui engendre une homogénéisation du vivant, ce qui, paradoxalement, contribue à rendre tout le monde pareil et donc à gommer la singularité des individus.

Le risque de déviance est réel puisque, en réduisant ainsi la diversité, en réduit d’autant les possibilités de comparer et donc de choisir. Et en plus de restreindre le champ des libertés individuelles puisque la liberté dépend de la possibilité de choisir, cette homogénéisation fait perdre à la vie sa richesse et donc aussi la faculté de s’en émerveiller.

Il semblerait que ce soit d’ailleurs à cela que l’on reconnaît la marque du diable : les bonnes intentions finissent par aboutir à l’extrême opposée de ce qu’elles étaient censées produire, et c’est peut-être pour cette raison qu’on dit que l’enfer en est pavé.

Cependant, si dramatique que puisse être l’état du monde moderne à bien des égards, la situation n’est pas désespérée pour autant, bien au contraire. Car à force de vouloir singer Dieu, le diable finit par devenir singe lui-même et à en devenir grotesque. C’est pourquoi, en allant toujours plus loin dans la profanation du sacré, le matérialisme contribue, bien malgré lui, à le mettre d’autant plus en valeur. En effet, aujourd’hui, le sacré est devenu comme une oasis au milieu du désert ; c’est un havre de paix et une bouffée d’oxygène pour l’âme humaine, qui la vivifie, la recentre sur l’essentiel et lui rappelle la valeur inestimable de la vie comme de l’incarnation qui lui permet d’en faire l’expérience. C’est pourquoi le diable ne pourra jamais gagner la guerre qu’il livre contre Dieu et le sacré. Au plus il profane l’existence, au plus il en fait ressortir la dimension sacrée là où elle est encore présente, par effet de contraste. C’est la raison pour laquelle, au bout du compte, le « diable porte pierre ! », toujours.

Pureté et purification

Comme vous l’aurez compris, le sacré est étroitement en rapport avec les notions de pureté et de purification. Sans doute est-ce pour cette raison bien précise qu’elles sont aujourd’hui également de plus en plus souvent attaquées par les adeptes du matérialisme et du paradigme techno-progressiste qui lui est très étroitement lié. Parler aujourd’hui de pureté et de purification peut potentiellement exposer à un lynchage médiatique en règle de la part des nouveaux « gardiens de la raison ». Non conscients de leurs propres biais cognitifs (un comble pour ces adeptes de l’esprit critique, du scepticisme et de l’ « art du doute » ou zététique !), ils usent d’amalgames et de sophismes pour tenter de discréditer des thérapies et des pratiques pourtant reconnues pour leurs résultats, en brandissant des étiquettes déshumanisantes et diffamantes telles que « charlatans » et « gourous », sans jamais manquer d’alerter au passage du « risque de dérives sectaires », sachant que cela suffira à jeter la suspicion et le doute sur des praticiens qui, pour la grande majeure partie d’entre eux, sont pourtant honnêtes et bienveillants. Mais ceci fait aussi partie des dérives du matérialisme idéologique qui consiste à profaner, diaboliser et empêcher tout ce qui n’est pas validé par la science matérialiste et le techno-progressisme.

Là où cette idéologie a démontré sa haute efficacité pour dépraver l’âme humaine et dégrader son enveloppe charnelle, la spiritualité (en tant que démarche) suit une tendance exactement inverse en visant à restaurer l’une et l’autre dans leur état de pureté (et donc aussi de santé), par l’entretien d’une dynamique de purification. Dans les traditions religieuses, il est question de rituels de purification, de carêmes, de jeûnes, de temps de silence, de baptêmes ou encore d’ablutions.

Du côté de l’alchimie interne, l’œuvre au blanc est l’étape au cours de laquelle la « matière psychique » est purifiée, c’est-à-dire « lavée » de ses impuretés afin qu’elle puisse retrouver son état premier, sa « simplicité indifférenciée », soit l’état de pureté primordiale de la « matière », afin d’en faire un prisme parfaitement apte à recevoir et à rayonner la lumière de l’Esprit dans le monde.

La circoncision dont il était question plus haut en fait aussi partie puisqu’il s’agit d’un processus de purification par le dévoilement du cœur, symbole de l’Esprit. Dans une certaine mesure, le pèlerinage que l’on rencontre dans plusieurs traditions, vise également la purification de l’être.

C’est aussi évidemment le but recherché par toute forme d’ascèse digne de ce nom. Comme je l’avais déjà fait remarquer en citant René Guénon dans le cours 10 [10], le mot « ascèse » correspond à tapas en sanskrit, dont le sens premier est « chaleur », chaleur qui fait directement référence à l’action d’un feu, en l’occurrence un « feu intérieur » qui a le pouvoir de transmuter les impuretés de l’âme. Ce feu intérieur est celui de l’Esprit. C’est la lumière spirituelle à laquelle l’âme s’ouvre lorsque le mental trouve le calme, quelles que soient les pratiques ou les méthodes utilisées à cette fin.

En aucun cas la volonté personnelle ne peut réaliser cette œuvre de purification. Toute volonté d’agir mentalement d’une manière ou d’une autre en vue de procéder directement à cette purification, ne peut qu’aboutir au résultat opposé, en fermant davantage encore la porte de l’âme à la lumière spirituelle. Tout au plus l’être peut-il orienter son attention de sorte à ce que sa conscience devienne pure, équanime. On peut donc conclure de ceci qu’il est possible d’atteindre l’état de pureté de la conscience à chaque instant sans pour autant que l’ensemble des impuretés de l’âme aient été dissoutes, purifiées.

Il est en effet toujours possible de calmer le mental et d’établir la conscience dans son état de pureté. Cela, tout un chacun peut en faire l’expérience. Durant une méditation, le mental se calme et on fait l’expérience de cette pureté de la conscience. On sent une paix, qui peut s’accompagner d’états très agréables tels que la joie ou l’émerveillement. C’est le signe que l’âme est imprégnée par la lumière spirituelle. Toutefois, cela ne signifie pas que tout aura été purifié pour autant jusque dans les profondeurs de la psyché.

Il faut bien comprendre que la purification s’opère graduellement, couche par couche. Il faudra donc faire en sorte d’établir aussi souvent que possible la conscience dans son état primordial de pureté afin que la lumière spirituelle puisse poursuivre son œuvre de purification, et ainsi continuer à « alchimiser » l’âme dans toutes ses composantes, dans toutes ses dimensions.

Si l’état de pureté de la conscience peut être obtenu à chaque instant, par un simple effort d’attention grâce auquel l’être se positionne dans l’observation détachée, c’est pour la simple et bonne raison que l’essence de l’être (c’est-à-dire l’esprit) n’est pas autre chose que l’attention pure, la lumière spirituelle. Lorsque l’on retrouve cette capacité toute naturelle à observer, percevoir, ressentir sans avoir recours au mental, celui-ci se met au repos et la conscience peut alors retrouver son état d’équanimité.

Voie directe et voie indirecte

Cette distinction entre pureté et purification permet d’expliquer la différence qui existe entre les deux grandes voies de l’Éveil spirituel : la « voie directe » et la « voie indirecte » [11].

L’enseignement relatif à la première voie – la voie directe –, affirme que nous sommes déjà parfaits, déjà purs, et qu’il suffit de retourner l’attention sur elle-même pour réaliser cette pureté. Cette réalisation spontanée procède d’une simple conversion de l’attention, grâce à laquelle le mental est calmé instantanément. En l’absence de mouvement dans le mental, la conscience de l’âme devient immaculée, transparente et vide, à l’image parfaite de l’Esprit qu’elle peut ainsi refléter dans le domaine individuel. Voilà à quel point il est simple de faire l’expérience de notre véritable essence spirituelle, du moins l’expérience de son reflet dans le mental lorsque celui-ci est rendu parfaitement silencieux. L’équanimité de la conscience la rend pure, « éveillée », à l’image du reflet parfait du soleil sur un plan d’eau lisse, sans vagues (vagues qui symbolisent les impulsions ou oscillations mentales). Tout comme le reflet du soleil sur ce plan d’eau lisse et immobile donne une image parfaite du soleil dans le ciel, l’équanimité rend la conscience aussi pure et parfaite que la lumière de l’Esprit.  

Cependant, cette pureté de la conscience n’est que superficielle puisque, sous la surface, la psyché peut comporter encore de nombreuses impuretés qui, tôt ou tard, créeront des vagues à la surface, faisant perdre à la conscience son état d’équanimité. Mais, dans la voie directe, on ne se soucie pas de ces « remontées » puisque, quoi qu’il arrive, il suffit de prendre conscience de l’immobilité silencieuse qui est déjà là, à l’arrière-plan des mouvements produits par le mental et par l’émotionnel, pour que le calme puisse à nouveau s’y manifester.

Cet arrière-plan spirituel lumineux peut être mis en rapport avec le « refuge » dont parlait le Bouddha lorsqu’il disait : « Soyez à vous-mêmes votre propre refuge. Soyez à vous-mêmes votre propre lumière. » Il peut également correspondre à la « base » dont parlait un des grands maîtres du bouddhisme tibétain, Longchenpa : « La base est présentée en tant que pureté primordiale. La base est présentée comme présence spontanée, car dans l’essence de Rigpa les qualités sont présentes d’elles-mêmes depuis toujours, sans aucune impureté, comme les rayons qui émanent du soleil. La base est donc spontanément accomplie [12]. »

De cette lumière qui émane du cœur de l’être, l’exploratrice Ella Maillart en a également parlé à sa manière : « La lumière de perception, c’est le présent immédiat. […] C’est le mystère suprême. C’est la présence de l’Esprit. La chose la plus importante devant laquelle on se met à genou. Il n’y a pas besoin d’aimer les religions ou quoi que ce soit ou de fabriquer un Dieu qui est fabriqué par le mental. […] Personne ne peut expliquer ce qu’est la vie, [ce qui fait] que vous et moi soyons vivants en ce moment. Alors cette chose-là est capitale et c’est ce que les hindous appellent le vrai “Je”, qui est là tout le temps. Alors quand on part à la recherche de la vérité, moi j’avais la question classique : “qu’est-ce que c’est que le réel, dans le moment présent ?” […] C’est la question de base ! Quand vous arrivez chez un sage, il éclate de rire et il dit : “mais, vous êtes le réel. On ne peut pas le trouver, vous l’êtes, de même que vous ne pouvez pas voir votre œil. ” […] C’est ce qu’eux appellent le vrai “Je”. C’est l’inchangeant, qui est là tout le temps. La peau change. Les idées, le mental, changent. […] Les émotions changent tout le temps. Qu’est-ce qui ne change pas ? L’inchangeant, ce que j’appelle la lumière de perception [13]. »

C’est aussi certainement à cette lumière de l’Esprit que Saint Pierre faisait référence lorsqu’il évoquait « la pureté incorruptible d’un esprit doux et paisible [14]. »

En effet, l’être, au niveau de sa dimension spirituelle, est déjà éveillé, déjà pur, déjà parfait, déjà « réel » puisque l’Esprit est LA réalité, suprême et ultime. C’est pourquoi la perfection et la pureté inhérentes à la dimension spirituelle peuvent être « incarnées » par le simple fait d’être, en pleine conscience. Être, simplement être, en phase avec le moment présent, tel qu’il est. C’est une lumière de perception ou d’attention pure, en effet, qui témoigne de la présence de l’Esprit en chaque instant, en chaque lieu. Symboliquement, c’est comme si le rayon de lumière prenait conscience de sa propre source. Se faisant, il se désidentifie de l’ego et, automatiquement, la conscience de l’âme retrouve le calme, synonyme de pureté, d’équanimité, de perfection, de simplicité et d’innocence.

Dans la voie indirecte, on va au contraire chercher à orienter la lumière de l’Esprit (donc l’attention pure) directement sur les composantes de l’âme vivante de sorte à ce qu’il puisse les purifier, les transmuter. La volonté personnelle, égotique, est alors partie prenante dans le processus de purification dans la mesure où elle « canalise » l’attention sur les manifestations de nature mentales et émotionnelles, pour les observer avec détachement, équanimité. Cette orientation de l’attention pure procède en effet d’une volonté, une volonté d’aimer inconditionnellement le vivant, grâce à laquelle l’être réalise l’alignement de toutes les dimensions qui le constituent : corps, âme et esprit.

Si, dans la voie directe, les états d’absorptions dans la lumière spirituelle sont parfois tels que l’individu cesse temporairement d’exister, dans la voie indirecte en revanche il ne disparaît jamais vraiment ; il y est transmuté et sublimé par la lumière spirituelle, pour aboutir, au terme du processus de purification, à la réalisation d’un authentique « Corps de gloire ».

Si la voie directe est une voie intellectuelle fondée sur la connaissance de l’être (l’êtreté), voie dite « sèche », la voie indirecte est une voie fondée sur l’amour du vivant, raison pour laquelle on l’assimile à une voie « humide ».

Si ces deux voies semblent opposées, elles peuvent toutefois être alliées en une seule et même voie de synthèse. Pour reprendre la métaphore du rayon de soleil, celui-ci, en plus d’être conscient de sa propre lumière, est également conscient de tout ce qu’il est susceptible de toucher et d’éclairer au sein du monde manifesté. C’est ainsi que la voie directe, polarisée sur l’être, peut être mêlée à la voie indirecte, basée sur l’amour du vivant. Cette complémentarité permet de faire l’expérience de l’amour divin, lequel est tout de même un « don de Dieu » auquel il n’y aurait aucun avantage à renoncer.

Pour une application pratique de ces explications, reportez-vous à l’exercice de ce cours.

L’être et l’ego

Pour reprendre la métaphore précédente, l’être, dans son essence spirituelle, est semblable à un rayon de soleil [15] émané du soleil. Cette lumière informelle, spirituelle, n’est autre que l’esprit (avec un « e » minuscule), dont le rayonnement en direction de l’âme y produit le phénomène de la conscience individuelle (au niveau du mental, qui est donc lié à l’âme et non à l’esprit).

La résultante de cette rencontre entre l’esprit et l’âme, c’est ce point lumineux de conscience dont tout un chacun fait l’expérience au travers du « sens de l’existence », autrement dit l’impression « je suis », qui n’est autre que l’ego, avec toutes les formes d’état de conscience qu’il est susceptible d’expérimenter, de la dualité la plus grossière à l’unité la plus subtile.

Je parle bien ici du « phénomène de la conscience » puisque cette sensation de « moi » peut être perçue par l’esprit, comme n’importe quel autre phénomène au sein du vivant. Si l’esprit est l’observateur détaché qui perçoit la conscience de l’âme, alors cela veut dire que l’être n’est pas exclusivement ce « je » auquel il a pris l’habitude de s’identifier depuis la petite enfance. En réalité, ce « je » est ce simple phénomène de la conscience individuelle dont les différents états (de conscience) dépendent de l’activité mentale avec toute la gamme qu’elle est susceptible de produire, du calme parfait à l’agitation extrême, à l’image de la surface de l’océan, qui peut être parfaitement calme ou au contraire extrêmement agitée lors d’une tempête par exemple. Ainsi, si la plupart du temps ce « je » (l’ego) est sous l’influence des pensées, déterminée par le jeu des impulsions contraires, il peut aussi retrouver son état de pureté primordiale, édénique. C’est le cas lorsqu’il est observé avec détachement, avec une attention pure (celle de l’esprit), non voilée par le phénomène de l’identification au mental. L’expérience qui en résulte est celle de l’êtreté, laquelle se manifeste dans la psyché sous la forme de la pureté, de la paix, du bien-être et de la joie d’être.

De ceci, on peut comprendre que l’ego, lorsqu’il est transcendé grâce à l’observation détachée à partir de l’état de pure attention de l’être (l’esprit), n’est absolument pas problématique. Bien au contraire puisque, dans ces conditions, le reflet qu’il forme sur le miroir de l’âme permet à l’être de faire l’expérience de l’êtreté et de la pureté qui lui est associée, état suprême, édénique ou primordial de la conscience que les orientaux appellent : sat-chit-ananda (être-conscience-félicité), et que l’on peut également assimiler au Nirvāna et au royaume de Dieu.

En vérité, l’ego ne devint problématique que lorsque l’être s’identifie à la personnalité. Il croit alors être l’ego et se croit séparé de tout ce qui est distinct de cette personne qu’il incarne. C’est cette identification de l’être à l’ego qui génère l’illusion d’être cette personnalité plutôt que l’être, en unité avec l’Esprit.

Cela rejoint les propos du maître indien Nisargadatta Maharaj : « La personne [en tant qu’ego, N.d.A.] n’est que le résultat d’un malentendu. En réalité, il n’y a rien de tel. Les sensations, les pensées et les actes défilent devant l’observateur [l’esprit] dans une succession sans fin qui laisse des traces dans le mental et donne une illusion de continuité. Un reflet de l’observateur dans le mental crée la sensation du “je” et la personne acquiert une existence apparemment indépendante. En réalité, il n’y a pas de personne, seulement l’observateur qui s’identifie au “je” et au “mien” [16]. »

« Dans l’illusion individuelle, je suis comme séparé de moi-même, et le “moi” créé n’est qu’un voile qui me cache à “Moi-même” qui suis incréé [17]. » Frithjof Schuon

Le soi et le moi

Avant que la quête spirituelle ne commence, l’être (ou l’esprit) se confond la plupart du temps avec son reflet en l’âme vivante. Dans ces conditions, il est possible de dire qu’il y a l’être en soi, disons le « soi », et l’ego, disons le « moi », tous deux coexistant en l’être humain. Le « moi » n’est pas le « soi » ! L’ego est simplement l’identité personnelle qui résulte de l’identification de l’être (le « soi ») à la personnalité, lui donnant cette fausse impression d’être un ego séparé, avec la peur et la souffrance qui en découle.

La quête spirituelle peut véritablement commencer quand l’être réalise qu’il n’est pas ce « moi » auquel il s’est toujours identifié jusque-là et qui avait déterminé la quasi-totalité de son expérience humaine. Comme l’a enseigné Gurdjieff :

« Tant qu’un homme se considère lui-même comme une seule personne, il restera toujours tel qu’il est. Son travail intérieur débute à cet instant où il commence à éprouver en lui-même la présence de deux hommes. L’un est passif et le plus qu’il puisse faire est d’observer et d’enregistrer ce qui lui arrive. L’autre, qui se nomme lui-même “moi”, qui est actif et parle de lui à la première personne [18]. »

La distinction entre le « soi » et le « moi », l’enseignant spirituel Eckhart Tolle en a très clairement fait l’expérience juste avant de vivre un moment d’éveil d’une grande intensité. En voici le témoignage, dont les passages les plus significatifs ont été tirés de l’introduction de son livre Le pouvoir du moment présent :

« Jusqu’à l’âge de treize ans, j’ai vécu dans un état presque continuel d’anxiété ponctué de périodes de dépression suicidaire. Aujourd’hui, j’ai l’impression de parler d’une vie passée ou de la vie de quelqu’un d’autre. Une nuit, peu après mon 29e anniversaire, je me réveillai aux petites heures avec une sensation de terreur absolue. Il m’était souvent arrivé de sortir du sommeil en ayant une telle sensation, mais cette fois-ci c’était plus intense que cela ne l’avait jamais été. Le silence nocturne, les contours estompés des meubles dans la pièce obscure, le bruit lointain d’un train, tout me semblait si étrange, si hostile et si totalement insignifiant que cela créa en moi un profond dégoût du monde. Mais ce qui me répugnait le plus dans tout cela, c’était ma propre existence. À quoi bon continuer à vivre avec un tel fardeau de misère ? Pourquoi poursuivre cette lutte ? En moi, je sentais qu’un profond désir d’annihilation, de ne plus exister, prenait largement le pas sur la pulsion instinctive de survivre. “Je ne peux plus vivre avec moi-même.” Cette pensée me revenait sans cesse à l’esprit. Puis, soudain, je réalisai à quel point elle était bizarre. “Suis-je un ou deux ? Si je ne réussis pas à vivre avec moi-même, c’est qu’il doit y avoir deux moi : le “je” et le “moi” avec qui le “je” ne peut pas vivre.” “Peut-être qu’un seul des deux est réel, pensai-je.” Cette prise de conscience étrange me frappa tellement que mon esprit cessa de fonctionner [sa conscience [19] devint soudainement équanime, N.d.A.]. J’étais totalement conscient, mais il n’y avait plus aucune pensée dans ma tête. […]

Je compris que l’intense oppression occasionnée par la souffrance cette nuit-là devait avoir forcé ma conscience à se désengager de son identification au moi malheureux et plein de peur profonde, qui en fin de compte n’était qu’une fiction. Ce désengagement avait dû être si total que ce faux moi souffrant s’effondra immédiatement, comme un ballon qui se dégonfle quand on enlève le bouchon. Tout ce qui restait, c’était ma véritable nature, l’éternel “je suis”, la conscience dans son état vierge avant l’identification à la forme. […]

Plus tard, les gens sont venus me voir à l’occasion en me disant : “je veux arriver à la même chose que vous. Pouvez-vous m’y amener ou me montrer comment faire ?” Et je leur répondais : “Mais vous y êtes déjà. Vous ne pouvez pas le sentir parce que votre mental fait trop de bruit” [20]. »

Cette réponse d’Eckhart Tolle renferme une profonde vérité, à savoir que nous sommes déjà l’être, parfait, complet, éternel, ici et maintenant, et que la seule chose qui nous empêche de le comprendre est le « voile » constitué par l’identification à la personnalité, avec l’illusoire impression qui en découle, cause de toute souffrance.

L’esprit et son reflet

Poursuivons avec un troisième chapitre consécutif consacré à la différence entre l’être en soi et le reflet de lui-même qu’il génère dans le domaine psychique, sous la forme de l’ego, reflet avec lequel il a tendance à se confondre avec pour conséquence l’illusion de la séparation (dualité) et la souffrance qu’elle induit, alors que, dans l’absolu, l’être et l’Esprit ne font qu’un (unité).

Même s’il ne faisait pas clairement la distinction entre l’âme et l’esprit, Maître Eckhart [21] avait réalisé qu’il y a bien deux « pôles » de perception en chaque être puisque d’après lui : « l’âme a deux yeux, un œil intérieur, et un œil extérieur. L’œil intérieur de l’âme regarde vers l’essence et la reçoit directement de Dieu ; c’est l’œuvre qui lui est propre. L’œil extérieur de l’âme se tourne au contraire vers toutes les créatures et les perçoit en image. »

Ici, l’œil intérieur est ce que Maître Eckhart appelait également le « fond de l’âme [22] », qui peut être directement mis en rapport avec l’esprit. Quant à l’œil extérieur, c’est la conscience individuelle, grâce à laquelle l’être peut effectivement percevoir le vivant et donc toutes les créatures « en images », comme celles qu’un spectateur perçoit sur un écran de cinéma.

Ces deux « yeux », l’auteur anonyme des Méditations sur les 22 arcanes majeurs du Tarot en a également parlé, en ces termes : « deux centres qui contemplent simultanément comme le feraient deux yeux qui seraient placés verticalement l’un au-dessus de l’autre, les deux aspects de la réalité, l’aspect phénoménal [ici, relatif à l’âme et au corps, N.d.A.] et l’aspect nouménal [ici, relatif à l’esprit] ? Et que c’est, grâce à ces deux centres ou “yeux”, que nous sommes ou pouvons être – conscients “de ce qui est en haut et de ce qui est en bas” ? […] En d’autres termes, deux, c’est le Souffle et sa Réflexion [23]. »

Cette distinction entre l’esprit (l’être en soi) et son reflet (l’ego) se retrouve dans certains textes sacrés, comme dans l’un des joyaux de l’hindouisme, le Mundaka Upanishad, sous la forme de la parabole des deux oiseaux inséparables, où ils sont respectivement assimilés à ātman (en unité avec Brāhman) et jīvātmān :

« Deux oiseaux, compagnons inséparables et portant le même nom, sont perchés sur le même arbre. L’un d’eux mange une figue savoureuse, tandis que l’autre, témoin [ātman, N.d.A.], le contemple, sans manger. (III-i-1) Sur le même arbre, l’âme individuelle [jīvātmān] est agrippée [attachée à la matière], pour ainsi dire captive [des impulsions contraires] ; et elle se lamente, accablée des soucis dus à son impuissance. Dès lors qu’elle aperçoit son compagnon, le Seigneur adorable dans toute Sa gloire, elle est subitement libérée [de la dualité et] de toute souffrance. (III-i-2) Lorsque le contemplateur aperçoit l’auteur couleur d’or du monde, le Seigneur, l’Esprit, la source de Brāhman, alors, en vertu de son illumination, il se défait du mérite comme du démérite, devient sans souillure, et atteint la parfaite équanimité. (III-i-3) »

Dans cette parabole d’une grande beauté et d’une grande profondeur symbolique, il est dit que les deux oiseaux sont inséparables et qu’ils portent le même nom, ce qui signifie qu’il n’y a pas de séparation entre eux dans l’absolu ; la séparation n’est qu’une illusion, qui est seulement vécue par l’oiseau qui symbolise l’ego, soit l’oiseau qui mange le fruit de l’arbre [24]. L’action de manger est ici une métaphore qui symbolise l’ensemble des actions accomplies par l’être à partir de l’ego, rendu « captif » de la matière par sa tendance à réagir constamment sous l’influence des impulsions de désir et d’aversion.

Au-delà du jeu de l’identification à l’ego qui s’opère à l’ « avant-plan », l’être est présent à l’ « arrière-plan », parfait, en équilibre, immobile, paisible et silencieux. Par un simple retournement de l’attention, il peut se libérer de son identification à la personnalité et réaliser sa propre essence [25], par le simple fait d’être (ni ceci, ni cela, simplement être). En conséquence de cette désidentification, un dévoilement s’opère et l’âme vivante est illuminée. Cette illumination permet à la « matière psychique » d’être graduellement transmutée, permettant à l’âme d’être progressivement libérée de ses impuretés et à sa conscience d’être de plus en plus enracinée dans l’équanimité parfaite, là où l’impression de séparation n’existe plus et où il n’y a plus que « un sans second ».

Dans la Bhagavad-Gītā, un autre texte sacré de l’hindouisme, il y a le dialogue entre Krishna et Arjuna, qui personnifie là aussi le rapport qui existe entre l’être en soi (ātman) et l’ego tant qu’individualité (jivātman). Krishna y incarne la sagesse de l’être réalisé auquel Arjuna se réfère pour savoir comment se libérer des illusions qui l’empêchent de réaliser sa Véritable nature et échapper ainsi au cycle infernal de la transmigration (samsāra).

Dans la tradition chrétienne, la double nature du Christ – le « Fils de Dieu » et « Fils de l’homme » – peut être également interprétée sous l’angle du rapport entre l’être en soi et l’ego, à condition d’accepter l’idée selon laquelle Jésus n’est pas né « divin », mais qu’il est devenu un « Avatar », c’est-à-dire une incarnation de l’Esprit, au terme d’un périple initiatique dont les étapes majeures sont autant de symboles des phases du Grand Œuvre alchimique que nous pouvons accomplir en nous-mêmes, la première d’entre-elles étant la… crucifixion.

Le caractère crucial du sacrifice

Entachées par les images morbides et les croyances déviantes fortement ancrées dans la conscience collective, la crucifixion du Christ a malheureusement perdu son sens initiatique, en tant que symbole de ce que chaque individu est amené à réaliser en lui-même pour sortir de la « nuit obscure de l’âme » et entamer le processus de renaissance intérieure, ou plus précisément dit par rapport à ce qui nous intéresse dans le cadre de ce cours, le processus d’incarnation de l’Esprit.

La crucifixion est à rattacher directement au symbolisme de la croix et plus particulièrement à l’axe vertical de cette dernière, qui représente le lieu où les forces opposées, symbolisées par les deux branches opposées de l’axe horizontal de la croix, sont conciliées, neutralisées, harmonisées. En cela, la crucifixion du Christ, qui place la personne de Jésus sur l’axe vertical de la croix, représente la neutralisation des impulsions d’attraction et de répulsion, avec pour conséquence directe la mort de l’ego, ou plus justement dit, le passage de l’état d’identification à la structure mentale à l’état de conscience équanime.

La « mort » dont il est question est donc purement symbolique. Elle correspond au renoncement par lequel l’être se détache de son ancien état de conscience fondé sur le jeu continuel des impulsions de désir et d’aversion, pour renaître à de nouveaux états de conscience, fondés sur l’équanimité, autrement dit l’observation détachée, l’attention pure et la concentration juste ou désintéressée.

Cette mort suivie d’une renaissance progressive est symboliquement analogue à la métamorphose de la chenille qui devient papillon. Il s’agit avant toute chose d’un changement d’état qui concerne la conscience en premier lieu, même si ce changement d’état de conscience aura assurément des répercussions sur la psyché et le corps. En vérité, c’est l’ancien état de conscience, celui de l’ego séparé, qui est sacrifié pour que l’être puisse renaître progressivement à l’unité de sa nature primordiale.

Cette mort symbolique, l’être peut la vivre à chaque instant en faisant l’effort de renoncer à toute forme d’identification aux mouvements des pensées et des émotions induits par les impulsions d’attraction et de répulsion. Ce renoncement est synonyme d’abandon, de détachement, de lâcher-prise, de désidentification et de soumission à la Volonté divine. C’est un simple effort de conversion de l’attention, qui permet à l’être de se positionner dans la verticalité. Ainsi aligné, sa conscience est dévoilée et le mental devient calme, permettant à la lumière spirituelle de s’y réfléchir et de s’infuser à travers lui dans la dimension psychique.

Sur le plan de l’anatomie subtile, cette verticalité suit le tracé de la nādī sushumnā. Les forces vitales contraires d’attraction et de répulsion, quant à elles, s’écoulent à l’intérieur des deux nādīs opposées, idā et pingalā, entrelacées en forme de spirale autour de la nādī centrale sushumnā.

Comme l’a enseigné le maître Omraam Aïvanhov : « Parmi les figures symboliques que les Initiés ont utilisées pour éclairer la structure de l’homme, il y a le caducée. Mais aujourd’hui, les gens voient ce symbole dans les pharmacies, sur les voitures des médecins… sans rien y comprendre. Le caducée est composé de deux serpents entrelacés autour d’une baguette. Ces deux serpents représentent les deux courants de la vie cosmique : le courant de l’attraction, ou de l’amour, et le courant de la répulsion, ou de la haine, enroulé autour de l’axe du monde. Le monde entier est mû par ces deux courants de la haine et de l’amour, car tout mouvement a pour origine l’attraction ou la répulsion [26]. »

Les courants de l’attraction et de la répulsion circulant dans les nādīs idā et pingalā sont aussi ceux qui participent à la construction et à la destruction partout dans la nature. Dès lors, afin de ne pas se méprendre sur le rôle de ces impulsions contraires, je rappellerai qu’elles ne deviennent potentiellement « problématiques » que lorsqu’elles infiltrent la dimension psychique, car c’est à ce niveau-là qu’elles sont susceptibles de placer l’être sous leur influence hypnotisante, par l’intermédiaire des pensées et des émotions, et d’entretenir en lui, à travers ces dernières, cette fausse impression d’exister en tant que « je séparé ». C’est en effet au niveau de la psyché que ces impulsions contraires se manifestent, sous la forme du désir et de l’aversion, de l’attachement et du rejet, de l’amour et de la haine, et sur le plan moral, de la connaissance du bien du mal. Ainsi, si ces impulsions contraires sont l’expression de la dualité qui existe dans la psyché de l’être humain tant et aussi longtemps qu’il demeure sous l’influence de sa nature inférieure, il ne faut pas oublier qu’elles sont également à l’œuvre sur le plan physiologique, où elles jouent un rôle absolument vital [27]. Ce n’est donc que dans la psyché, et plus particulièrement dans le mental, qu’elles peuvent devenir « déviantes ».

Quelques citations à méditer

« Pour se libérer de l’identification, l’homme doit être constamment sur ses gardes et impitoyable envers lui-même. C’est-à-dire qu’il ne doit pas avoir peur de démasquer toutes ses formes subtiles et cachées. Il est indispensable de voir, d’étudier l’identification, afin d’en déceler en nous-mêmes jusqu’aux racines les plus profondes. » Georges Gurdjieff

« L’état suprême n’est pas quelque chose à obtenir par une “effectuation” quelconque ; il s’agit uniquement de prendre conscience de ce qui est. » René Guénon

« Laissez à eux-mêmes les désirs et les craintes, accordez toute votre attention au sujet, à celui qui est derrière toute expérience de désir et de peur. Demandez : qui désire ? Que chaque désir soit un retour vers vous. » Nisargadatta Maharaj

« En chacun de nous existe un lieu dénué de maladie, qui ne ressent jamais de la douleur et qui ne peut vieillir ni mourir. Lorsqu’on va dans en ce lieu, les limitations que nous acceptons tous cessent d’exister. Elles ne peuvent même plus appartenir au domaine du possible. » Deepak Chopra

« Il fera mouvoir le monde, celui pour qui son petit-moi est mort et Dieu vit à sa place. » Vivekananda

« Le renonçant à son petit-moi et aux pièges du monde prend deux vœux : d’une part de réaliser la Vérité. D’autre part de secourir le monde. » Shivananda

« Pour Platon, l’âme humaine est comparable à deux chevaux. Un noir et un blanc. Le noir c’est le moi qui commande et le blanc, c’est le moi véritable. Celui qui commande dit “Donne-moi ce que je veux”, et l’autre dit “Donne-moi ce dont j’ai besoin”.  Il y a très peu de gens qui veulent ce dont ils ont besoin. » Idriss Aberkane

« J’ai compris que l’essentiel n’était pas dans la finalité de l’objectif, mais dans le chemin emprunté. » Sonia Mabrouk

« La vie, c’est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l’équilibre. » Albert Einstein

« Le succès n’est pas final. L’échec n’est pas fatal. C’est le courage de continuer qui compte. » Winston Churchill

« J’ai raté 9000 tirs dans ma carrière. J’ai perdu presque 300 matchs. 26 fois, on m’a fait confiance pour prendre le tir de la victoire et j’ai raté. J’ai échoué encore et encore et encore dans ma vie. Et c’est pourquoi je réussis. » Michael Jordan

« Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends. » Nelson Mandela

Pratique

Comme nous l’avons vu, la crucifixion est étroitement en rapport avec la notion de sacrifice, mot dont la signification étymologique est « faire sacré » (sacrum facere, en latin). D’ailleurs, sur le plan exotérique, la crucifixion est associée depuis des siècles à la figure du Christ, sacrifié dans le but de laver les péchés d’une humanité pécheresse. Sur le plan ésotérique, qui nous intéresse tout particulièrement dans le cadre du Cours du Vivant, le sacrifice dont il est question est celui de l’ego ou, plus justement dit, celui des impulsions contraires qui alimentent l’illusion d’un ego séparé.

Ce sont ces impulsions qu’il s’agit de « crucifier », autrement dit de sacrifier en y renonçant, pour que l’ego puisse renaître à un nouvel état de conscience, qui n’est plus fondé sur la dualité mais au contraire sur l’unité.
Cette vision ésotérique et symbolique de la crucifixion, étroitement liée au sacrifice et au renoncement, a été magistralement résumée en quelques mots par le sage indien Rāmana Maharshi :
« Jésus, le Fils de l’homme, est l’ego ou l’idée “Je suis le corps”. Après avoir été crucifié, il est ressuscité comme le Soi glorieux – Jésus, le Fils de Dieu. “Renonce à cette vie, si tu veux vivre.” »

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Chapitres supplémentaires :

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[1] Cela rejoint les paroles du Christ : « Le royaume de Dieu est au milieu de vous » (Luc 17:21).

[2] L’Éveil, une conversion du regard, Éditions Dervy, 2018, pp. 117-118.

[3] Cette pureté et cette innocence ne sont pas différentes de l’état de simplicité à laquelle le Christ faisait référence lorsqu’il parlait des petits enfants, simplicité qui était selon lui indispensable pour vivre le royaume de Dieu : « Laissez venir à moi les petits enfants, et ne les en empêchez pas ; car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. » Luc 18:16.

[4] Voir le cours 5, chapitre « Témoignage de l’état d’Éveil spirituel ».

[5] La citation exacte : « Crois-en mon expérience : tu trouveras quelque chose de plus dans les bois que dans les livres. »

[6] 1 Corinthiens 6:19.

[7] Le corps est également profané par certaines croyances religieuses du passé qui persistent malgré tout encore de nos jours. C’est l’exemple de la circoncision de la chaire, à laquelle on devrait préférer celle du cœur. La « circoncision du cœur » est une expression symbolique signifiant qu’il faut libérer l’Esprit des voiles mentaux qui l’empêchent de rayonner sa lumière, son amour, à travers la personnalité. Saint Paul y fait allusion dans son Épître aux Romains : « Mais le Juif, c’est celui qui l’est intérieurement ; et la circoncision, c’est celle du cœur, selon l’esprit et non selon la lettre. » Romains 2:29.

[8] Lors d’une conférence TEDx donnée à Boston en 2017, le Dr Tal Zaks a utilisé l’expression « pirater le logiciel de la vie » (Source : https://youtu.be/AHB2bLILAvM). Il est notamment à l’origine du vaccin à ARNm fabriqué par Moderna et utilisé durant la crise Covid-19.

[9] Les apprentis sorciers, Éditions Albin Michel / Versilio, 2023, p. 142.

[10] Voir le cours 10, chapitre « Ne pas confondre ascétisme et ascèse ».

[11] Ces deux voies peuvent être mises en correspondance, respectivement, avec la « voie sèche » et avec la « voie humide » en alchimie.

[12] La liberté naturelle de l’esprit, Éditions du Seuil, 1994, p. 153.

[13] Propos extraits d’une entrevue réalisée pour la chaîne télévisée France 3 en 1991.

[14] 1 Pierre 3:4.

[15] En réalité il n’y a pas de rayons solaires (ceux-ci apparaissent seulement lorsque la lumière est filtrée, par un nuage par exemple) ; il existe uniquement « une » lumière diffusée par le soleil. Toutefois, sur le plan symbolique, considérer qu’il y a un nombre indéfini de rayons de soleil permet d’envisager qu’il en est de même pour les êtres, tous reliés à la même « source » (l’Esprit), unis par elle, semblable dans leur essence spirituelle (l’esprit, qui représente toujours la même lumière).

[16] Je Suis, Éditions Les Deux Océans, 1982.

[17] L’œil du Cœur, Éditions L’Harmattan, 2017, p. 220.

[18] Ibid., p. 252.

[19] Si l’on veut être tout à fait rigoureux par rapport à la terminologie employée, il est plus juste de parler de la conscience que de l’esprit. Dire « mon esprit » ne fait pas sens si l’on considère que l’esprit est lui-même l’observateur suprême. En effet, l’emploi du pronom possessif « mon » en l’associant à l’esprit signifierait qu’il y aurait un observateur au-delà de l’esprit. En revanche, l’être peut s’exprimer en disant « ma conscience » puisque celle-ci appartient au domaine de l’individualité, et que le pronom possessif lui permet de se distinguer des autres « consciences » qui l’entourent.

[20] Éditions Ariane, 2000, pp. 1-3.

[21] À ne pas confondre avec Eckhart Tolle.

[22] Voir le cours 7, chapitre « L’esprit, la dimension spirituelle de l’être ».

[23] Éditions l’Aubier, 1984, p. 55.

[24] Notons ici la correspondance avec le fruit défendu de la connaissance du bien et du mal, auquel Adam et Ève ont goûtés selon le récit de la Genèse, et qui fut la cause de leur « chute » dans le règne de la dualité, avec la culpabilité, la peur et la souffrance qui en ont été la conséquence.

[25] C’est la voie directe à laquelle il a été fait référence plus haut.

[26] Les fruits de l’Arbre de Vie – La tradition kabbalistique, Éditions Prosveta, 1987, p. 52.

[27] Elles se manifestent par exemple au travers de l’inspiration et de l’expiration, de la systole et de la diastole du cœur, ou encore de l’assimilation et de l’élimination des cellules.