Le Cours du Vivant

Cours n°45 - La double nature de l'être
La double nature de l'être
Théorie
Chaque être humain peut incarner deux natures. L’une est divine, l’autre est purement animale. Au départ, dans les premières semaines de son existence, l’être incarne pleinement sa dimension spirituelle, divine. La lumière spirituelle se réfléchit sans voile dans sa psyché en développement et il vit de ce fait en unité avec sa véritable essence.
Mais sous l’effet de la formation du mental et des expériences que les circonstances vont lui faire vivre, les impulsions de sa nature inférieure vont petit à petit prendre possession de la psyché et y induire le phénomène de l’identification. L’être va ainsi quitter son état édénique à partir duquel sa conscience se sent en unité avec tout ce qui est, pour « chuter » dans la dualité à travers un mode de fonctionnement déterminé exclusivement par le jeu de ces impulsions contraires, celles de l’attachement et du rejet. Cette phase va permettre la structuration de l’ego, jusqu’à ce que les valeurs morales du monde extérieur ne viennent réprimer certaines pulsions de l’être, créant chez lui des conflits avec lesquels il devra apprendre à composer tant bien que mal pour interagir avec la société et les autres, en créant pour cela le plus souvent des mécanismes d’évitement et de compensation.
C’est ainsi que l’être va grandir en tant qu’ego, dans la croyance fortement enracinée dans sa psyché qu’il est un individu séparé, dont l’état d’être sera la plupart du temps conditionné par le jeu des impulsions contraires, que celles-ci soient orientées librement pour assouvir ses désirs ou qu’elles servent à réprimer certaines de ses pulsions. Dans un cas comme dans l’autre, l’être sera sous l’emprise de sa nature inférieure, sa nature animale.
Nature animale ou inférieure
Le fait d’associer la nature animale à la nature inférieure de l’être ne doit pas nous conduire à porter un jugement de valeur à l’égard de tous les êtres vivants qui appartiennent au règne animal. Ceux-ci vivent bien mieux leur nature que l’être humain car ils ne sont pas, pour la grande majorité d’entre eux [1], doté d’une structure mentale qui peut rendre névrosés, psychotiques ou pervers.
Il convient ici de parler de nature inférieure ou de nature animale en considérant que l’être humain est, dans ces conditions, sous l’influence exclusive des impulsions contraires, incapable de positionner sa propre conscience dans l’équanimité et donc incapable de fonctionner autrement que par le désir et l’aversion, l’attachement et le rejet. Il est alors totalement identifié à sa nature animale ou inférieure par opposition à sa véritable nature divine, spirituelle.
Comme l’a exprimé Omraam Mikhaël Aïvanhov : « Une grande confusion règne dans la tête des humains, c’est pourquoi il est nécessaire de leur faire prendre conscience de l’existence en eux d’une nature supérieure qui a des manifestations opposées à ce qu’ils appellent la nature humaine, car cette “nature humaine” n’est en réalité que leur nature inférieure héritée du règne animal. Combien de fois pour justifier certaines faiblesses on entend dire : “C’est humain !” Et en réalité, si on y réfléchit bien, “c’est humain” signifie tout simplement : c’est animal ! Il n’est écrit nulle part que l’homme soit obligé de se laisser aller à de telles faiblesses [2]. »
Cette « chute » dans la nature animale, l’être peut à un moment donné l’inverser pour amorcer une remontée au cours de laquelle sa véritable nature, divine, va progressivement réaliser la transmutation de sa nature inférieure, de sorte à ce que l’une et l’autre puissent cohabiter en équilibre, permettant à l’être de vivre une spiritualité incarnée, en tant que résultat de cette conjonction ou réunification de ses deux natures opposées, rendues de ce fait complémentaires.
Comme nous l’avons vu, c’est par l’effort de concentration de l’attention avec justesse et l’équanimité que cet effort lui permet d’atteindre, que l’être va réussir à se maîtriser et à transmuter progressivement sa nature inférieure, à la manière de la chenille qui va progressivement se transformer, quitter sa chrysalide et prendre son envol en tant que papillon accompli. C’est là tout l’enjeu de la quête spirituelle, alchimique, telle qu’elle est abordée dans le Cours du Vivant.
Recherche de la transcendance
Face à la souffrance que l’être ressent en étant coupé de sa nature supérieure (sous l’effet de l’ignorance et de l’illusion) et face à l’insatisfaction que lui procure un mode de fonctionnement déterminé exclusivement par les impulsions contraires, il arrive qu’il ressente en son for intérieur un appel à la transcendance ou, ce qui revient au même, un appel à réaliser la dimension spirituelle et métaphysique de son existence.
« Lorsque nous avons fait le tour de ce jeu de yoyo plaisir-douleur, au point que nous n’y trouvons plus aucun intérêt, alors il est temps d’aller au-delà de la conscience et des sens. Sans les renier et sans les perdre, mais en les vivant dans leur caractère transcendé [3]. » Yéchoua
Avant de vivre concrètement cette transcendance, l’être passe bien souvent par une phase de recherche intellectuelle durant laquelle il va manifester de l’intérêt pour l’ésotérisme, la philosophie, le développement personnel, la thérapeutique, le mysticisme, l’occultisme, la méditation, le yoga, etc. Cet intérêt va également parfois se manifester concrètement par la participation à des stages ou à des ateliers, par l’adhésion à des groupes, à des ordres initiatiques, à des mouvements religieux ou simplement par la recherche d’information dans des livres sur ou Internet.
L’être sentira que le passage par une forme de transcendance ou de réalisation métaphysique est le seul moyen de se libérer de tout ce qui ne lui correspond pas pleinement et pour devenir « la meilleure version de lui-même », pour reprendre une expression à la mode dans le domaine du développement personnel.
Le Dr Jean Marchal a parfaitement résumé en quoi cette transcendance est nécessaire si l’être entend se donner une chance de réaliser sa dimension métaphysique et se libérer ainsi de la souffrance qui est indissociablement liée à sa nature animale :
« Le mot “métaphysique” signifie étymologiquement “au-delà de la nature”. Or la loi fondamentale de la nature est la loi de l’attraction-répulsion ; le monde physique n’existe que par elle : là où il y a deux, il y a attraction ou répulsion. Le sens ultime du mot métaphysique est donc : au-delà de l’attraction-répulsion ; et là où il n’y a plus attraction ni répulsion, il n’y a plus de dualité. La réalisation métaphysique pour l’être humain, c’est l’entrée dans une conscience immuable, affranchie de la dualité : conscience libre de toute attraction ou répulsion [4]. »
Comme nous l’avons vu à plusieurs reprises tout au long du Cours du Vivant, c’est en positionnant sa conscience personnelle dans l’équanimité que l’être peut neutraliser en lui-même l’influence des impulsions contraires et ainsi s’ouvrir à sa véritable essence, spirituelle, métaphysique.
À chaque fois qu’il produit un effort pour maîtriser son attention afin de la rendre équanime (donc désidentifiée de la structure mentale et du jeu des impulsions contraires qui en oriente constamment les pensées), sa nature inférieure ne pourra plus l’influencer et les impulsions contraires verront leur énergie autant que leur force décroître.
C’est un peu comme le principe des vases communicants : plus l’être stabilise sa conscience dans l’équanimité, plus la lumière spirituelle s’imprègne en lui et plus l’emprise de la nature inférieure diminue. Aussi, lorsqu’elle pénètre les couches du psychisme qui étaient jusque-là sous l’empire des impulsions contraires, la lumière spirituelle peut procéder à leur transmutation. Et comme ce sont ces impulsions qui induisent le phénomène de l’identification de l’être à sa personnalité, cette identification deviendra de moins en moins forte à mesure que l’être s’efforcera de poursuivre cette œuvre alchimique à l’intérieur de sa psyché. C’est ainsi que, graduellement, couche par couche, l’être purifie sa nature inférieure et la rend ainsi apte à incarner toujours davantage sa dimension spirituelle.
Chercher la transcendance ne signifie donc pas que l’on se dissocie de la dimension matérielle de l’être. Cela veut simplement dire que l’être permet à sa conscience de s’affranchir du joug de l’attraction et de la répulsion afin qu’elle puisse s’illuminer et qu’il puisse faire l’expérience de la réalité à travers la pure lumière de l’Esprit plutôt qu’à travers le filtre déformant de sa structure mentale. C’est ce qui lui permettra de vivre « l’unité au cœur de la diversité » et de jouir de la félicité qui accompagne un tel état de conscience non-duel.
De l’ego à la pure êtreté
Rectifier la nature inférieure pour qu’elle puisse cohabiter harmonieusement avec la nature supérieure est un long processus alchimique ; on ne « switche » pas de l’une à l’autre comme on permuterait un interrupteur.
Comme nous l’avons vu, ce qui détermine l’existence de l’ego, c’est le jeu des impulsions contraires d’attraction et de répulsion (désir-aversion) au niveau mental. Dans l’hindouisme, on appelle ces impulsions vāsanā. Avec les samskāra auxquelles elles confèrent une énergie et un dynamisme, les vāsanā composent la structure mentale.
Si ce sont ces impulsions qui induisent le phénomène de l’identification de l’être à la nature inférieure, il est facile de comprendre que ce sont ces mêmes vāsanā qu’il va falloir dissoudre au niveau de la psyché. Une fois entièrement annihilées, l’être ne peut plus s’identifier à ce qu’il n’est pas et, par conséquent, ne peut plus faire obstacle à sa véritable essence qui est la lumière du pur Esprit. Dans ces conditions, l’impression de séparation qui définissait l’état d’existence de l’ego cesse et l’être fait l’expérience d’un état de conscience non-duel, avec la félicité qui accompagne cet état de « présence éveillée ».
En résumé, nous avons au départ l’ego, c’est-à-dire la fausse identité induite par l’identification de l’être à sa dimension animale, instinctive, sous l’effet des impulsions contraires qui en déterminent la nature autant que le fonctionnement. L’être, qui est fondamentalement pure attention, peut toutefois se désidentifier du jeu de ces impulsions contraires en en observant avec détachement les mouvements qui vont et qui viennent dans son propre champ de conscience, au niveau de sa structure mentale.
Ce détachement synonyme de désidentification permet à l’être de « dévoiler » sa conscience individuelle, ouvrant ainsi la porte par laquelle la lumière spirituelle (soit la nature supérieure de l’être) peut atteindre l’âme et en alchimiser la nature. Une catharsis psychique s’opère ainsi graduellement et les impulsions contraires sont de moins en moins actives au niveau psychologique, ce qui pacifie de plus en plus la conscience individuelle, lui permettant de s’établir dans le calme de l’équanimité de plus en plus souvent et avec de moins en moins d’efforts. Cette stabilisation dans l’équanimité s’accompagne d’un état de bien-être, de joie, d’amour, de compassion, d’émerveillement, de confiance, etc. En d’autres termes, la conscience s’illumine et l’impression de séparation qui résultait de l’identification s’étiole, ce qui permet à l’être de sentir grandir en lui la sensation de l’unité. C’est ainsi qu’au terme du processus de transmutation alchimique, l’impression de séparation inhérente à l’ego aura fait place à la pure conscience d’être, non-séparée, en unité avec tout ce qui est.
Dans un tel état d’être, la conscience individuelle demeure active bien évidemment car l’être continue de percevoir la réalité à travers ses sens internes et externes, mais la différence est immense puisqu’il ne se sent plus séparé de ce qu’il perçoit.
Cet état d’union consciente avec le Tout le libère de la peur et donc aussi de la souffrance. C’est pourquoi l’état d’unité déterminé par l’expérience de la pure êtreté là où celle de l’ego déterminait celle de la dualité, se manifeste sous la forme de la félicité sur le plan émotionnel.
Dans sa dimension spirituelle, l’être n’a jamais cessé d’être ce qu’il est : la pure êtreté. Grâce à la quête spirituelle, il aura simplement permis à sa conscience d’être libérée de sa tendance à fonctionner exclusivement au travers des impulsions contraires, pour demeurer dans le calme de la présence éveillée. La nature inférieure n’aura pas été reniée, mais simplement maîtrisée, pour que l’instinct de survie puisse jouer le rôle qui est le sien au niveau physiologique sans déborder sur le plan psychique en créant l’illusion d’un « faux moi » à défendre. En cela, on peut dire que l’être aura pu rétablir un juste équilibre entre ses deux natures.
La pure animalité ou satanisme
N’ayons pas peur d’en faire le constat : chez la plupart des êtres humains, c’est la nature inférieure qui prend le pas sur la nature supérieure et qui empêche par conséquent cette dernière de diriger la personnalité comme cela devrait pourtant être le cas si l’on part du principe que l’être humain devrait pouvoir vivre en paix avec lui-même et avec ses semblables, tout comme jouir d’une vie abondante dans un état de félicité permanent.
Comme nous l’avons vu, si c’est la nature inférieure qui conditionne l’état de conscience de l’être, celui-ci vit sous l’influence permanente des impulsions contraires, avec l’illusion de l’ego séparé qui en est la conséquence. Dans ces conditions, son état émotionnel dépend entièrement de sa capacité à satisfaire ses désirs et à repousser tout ce qui peut être source d’insatisfaction. Quand il s’agit de la satisfaction de besoins vitaux, l’instinct de survie est au service de l’épanouissement de l’être, mais lorsqu’il est orienté pour réaliser tous les caprices de l’ego et lui permettre de se développer pour prendre le dessus sur les autres, il est corrompu, perverti, puisqu’il est mis au service d’une pure et simple illusion – celle d’être un « moi » séparé –, avec toutes les conséquences karmiques qui en découlent.
Dans une telle dynamique, l’être illusionné va être obligé de faire beaucoup d’efforts pour réunir autour de lui les conditions à même de satisfaire ses désirs et pour se prémunir de tout ce qui peut potentiellement l’en empêcher. S’il est particulièrement centré sur sa personne et qu’il considère que son plaisir est absolument prioritaire, il n’hésitera pas à faire passer sa petite personne avant les autres, égoïstement. Pour parvenir à ses fins, il justifiera tous les moyens, même les plus immoraux. Lorsque l’ego est à ce point hypertrophié, le bien et le mal ne sont plus déterminés par les codes moraux issus des traditions religieuses ou du simple bon sens, mais par ses propres critères, édictés sur la base de ce qui lui procure du plaisir et du déplaisir. S’il doit manipuler, mentir, calculer, contrôler et profiter des autres, cela ne lui posera aucun problème dans la mesure où ce sera « bien » pour lui, pour sa croissance personnelle, ses affaires, ses relations, sa réputation, son avenir, etc.
Un tel relativisme moral est évidemment aux antipodes de la véritable spiritualité. Celui ou celle qui fait le choix de vivre de manière totalement égocentrée se fiche bien évidemment du sort de la planète et de ses semblables, sauf lorsque son propre plaisir peut en dépendre. L’être qui vit ainsi, sous l’emprise totale de sa nature inférieure, ne se soucie en réalité que de sa propre préservation. « Après moi le déluge », comme le dit l’expression. C’est un culte total voué à l’ego !
Si la plupart des gens qui fonctionnent de cette manière peuvent malgré tout conserver une étincelle de conscience au fond d’eux leur permettant par moment d’éprouver un sentiment de culpabilité et donc de se remettre en question, d’autres pensent au contraire que l’égocentrisme est la seule voie à suivre et que le bien commun comme la spiritualité sont des chimères. Ces individus pensent que c’est la « loi du plus fort » qui prévaut en ce monde et qu’il est donc naturel de faire passer ses intérêts avant ceux des autres. N’ayons pas peur d’en faire le constat là non plus : lorsqu’un tel état d’esprit détermine la manière de vivre d’un individu, il s’agit purement et simplement de… satanisme.
Dans une de ses conférences, un sataniste repenti a défini ainsi cette idéologie particulièrement néfaste pour la société : « L’égoïsme est l’objectif suprême. […] Le premier principe du satanisme est le dicton selon lequel “la préservation de soi est la loi suprême”. Et cela va bien au-delà de la simple survie physique. En d’autres termes, la survie et le confort de l’individu physique sont toujours un objectif plus important que de faire ce qui est moralement juste. Ne vivez que pour vous-même et ne vous souciez que de vous et des vôtres. Si vous devez vous débarrasser des autres pour obtenir ce que vous voulez, qu’il en soit ainsi, car c’est un monde où les loups se mangent entre eux. Le principe qui définit de façon déterminante la vision globale du monde du satanisme est la pensée perpétuelle, inexorable, du moi, moi, moi, moi, moi [5]. »
En résumé, pour un sataniste, tous les coups sont permis pour maximiser ses chances de survivre tout en étant le plus souvent possible satisfait de soi et de ses conditions de vie, pour la jouissance qu’il va pouvoir en tirer. Cette religion « inversée » est sans doute celle qui fait le plus d’adeptes dans le monde, même si la plupart n’en sont absolument pas conscients (on pourrait dans ce cas parler de satanisme inconscient) et qu’ils adhèrent déjà à certaines formes de croyances religieuses traditionnelles. Il suffit de songer quelques instants à l’inversion des valeurs qui gangrène le monde moderne et de voir comment elle parvient à déterminer le mode de fonctionnement de milliards d’êtres humains pour se rendre à l’évidence que le satanisme règne actuellement en maître et que les êtres qui s’efforcent de se maîtriser pour laisser une chance à leur nature supérieure de diriger leur vie, représente une minorité.
Le satanisme qui ne dit pas son nom
Ces explications relatives au satanisme et à la mentalité particulière qui en détermine l’idéologie nous éloigne considérablement de l’image très « dark » qu’en donne notamment les industries du cinéma et de la musique.
Pentagramme inversé, 666, accoutrements gothiques, pratiques de magies noires, sacrifices d’enfants et d’animaux, orgies sexuelles, invocation d’entités démoniaques, etc., tout cela existe malheureusement mais il y a aussi une forme plus « épurée » de satanisme qui ne dit pas son nom et qui passerait totalement inaperçue si elle n’était pas reconnue et dénoncée. Ce satanisme à l’état pur correspond à une mentalité particulière au travers de laquelle le culte de la personnalité est poussé à son paroxysme. La plupart des satanistes que j’inclurais dans cette seconde catégorie ne savent même pas eux-mêmes qu’ils le sont tant ils sont éloignés du symbolisme et des pratiques occultes susmentionnés. En vérité, ils passeraient presque inaperçus dans la société, tant ils excellent dans l’art de se faire passer pour ce qu’ils ne sont pas : des gens tout à fait « normaux », bien sous tous rapports. Mais au-delà des apparences trompeuses, ils incarnent un profil psychologique particulier qui rend leur mentalité totalement démoniaque, celui de la psychopathie.
Les satanistes dont je parle ici sont les plus redoutables car ils possèdent une structure psychiques perverse et des facultés intellectuelles qui les rendent maîtres dans l’art de la manipulation et du contrôle. Intelligents, charismatiques et séducteurs, ils n’ont aucun scrupule à nuire à autrui si cela peut servir leurs intérêts. Comme le dit l’expression populaire, ils seraient prêts à tuer père et mère pour satisfaire leurs désirs et parvenir à leurs fins. Là encore, la fin justifie tous les moyens et c’est en quoi ils sont particulièrement nocifs pour la société dans son ensemble. Lorsque de tels individus sont à la tête des gouvernements, des institutions et des grandes multinationales – ce qui est très précisément le cas aux quatre coins de la planète malheureusement – c’est toute la civilisation qui est contaminée par leur mentalité.
Il ne faut pas aller chercher plus loin la cause des problèmes que l’humanité et la planète rencontrent depuis des siècles, alors que tout pourrait être tellement différent si le sommet de la pyramide du pouvoir était occupé par des êtres spirituellement éveillés, réellement aimants, compatissants et donc soucieux du bien-être de tous les êtres vivants.
Que ces psychopathes au sens clinique du terme conspirent ensemble ou qu’ils fassent cavaliers seuls, leur but est toujours le même : affermir leur pouvoir, leur contrôle et leur domination sur autrui afin de maximiser leurs chances de vivre en permanence dans le plaisir et la gratification. Pour cela, ils élaborent des stratagèmes qui leur permettent de maintenir les autres dociles, dépendants et faibles. Quand une civilisation est sous la coupe de tels individus, il est très difficile à la masse des êtres humains de s’éveiller car tout est entrepris pour la maintenir dans l’ignorance et donc dans sa condition la plus inférieure, celle où elle est dominée par sa propre « animalité ». Il suffit pour cela de lui faire perdre tout repère moral et surtout spirituel, et de lui faire croire que l’accès au bonheur ne peut dépendre que ses conditions de vie matérielles [6].
Dans ces conditions, la masse est maintenue esclave de ses propres pulsions, c’est-à-dire de sa propre nature inférieure, et peut donc être manipulée beaucoup plus facilement que si les individus qui la composent étaient alignés sur la guidance de leur nature supérieure, parfaitement maîtres d’eux-mêmes.
Vincit qui se vincit
Il est évident que celui ou celle qui transcende l’ego et qui de ce fait ressent l’unité fondamentale qui existe entre tous les êtres, ne peut plus être insensible aux conséquences que ses actes peuvent avoir sur ses semblables ainsi que sur la planète et les milliards de formes de vie qu’elle abrite. Se sentant uni à toute vie dans l’univers, il ressent que ce qu’il fait aux autres, il le fait à lui-même.
C’est de cette pure empathie qui résulte d’une intime et profonde connexion avec le vivant qu’est née l’éthique de réciprocité enseignée par les Sages de toutes traditions et cultures : « ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qu’il vous fasse », ou dans sa formulation positive « faites à autrui ce que vous voudriez qu’il vous fasse ». Avant qu’elle soit intégrée pleinement par l’expérience, cette « règle d’or » est semblable à un phare dans la nuit ; elle permet au chercheur spirituel de ne pas perdre de vue l’essentiel qui est la transmutation de sa nature inférieure par la maîtrise de soi, afin d’éviter qu’elle ne prenne le contrôle de sa personnalité et qu’elle le fasse chuter dans les pires travers dont l’ego est capable, avec toute la souffrance que cela peut engendrer, pour lui-même comme pour les autres.
Il faut être bien conscient qu’il n’est pas possible d’être sous l’influence de la nature inférieure sur le plan psychique tout en étant aligné sur la volonté supérieure du pur Esprit. Comme l’a dit le Christ : « Nul ne peut servir deux maîtres [7]. »
Il s’agit pour l’être de mener une « Guerre sainte » avec sa nature animale (et non pas contre celle-ci) afin que cette dernière cesse de s’opposer à sa nature divine, non pas en cherchant à la détruire en la combattant avec les mêmes armes qu’elles (les impulsions contraires), mais bien en cherchant le positionnement juste de la conscience, celui qui lui permet d’unir ses deux natures, pour réaliser ainsi la conjonction des opposés ou, ce qui revient au même, l’individuation de l’être.
C’est là le sens profondément initiatique du combat entre Thésée et le Minotaure, symbolisant respectivement l’être et sa nature inférieure. Comme le mythe le raconte, Thésée a abattu le monstre, mais en utilisant sa massue de cuir, symbole des pulsions animales de la nature inférieure. Il a donc perdu ce combat sur le plan spirituel, alors qu’il aurait triomphé sur le même plan s’il s’était servi de sa seconde arme, l’épée d’or, symbole de la lumière spirituelle, celle de l’Esprit et du Verbe.
Comme l’a expliqué Annick de Souzenelle : « Thésée n’écoute pas la Voix détentrice des dons des dieux – l’épée d’or. Il obéit à ses vertus inconscientes, riches des trésors de ses futurs dons, mais qui, investis avant le temps, ne sont que des vertus psychiques, énergies que la connaissance des lois ontologiques ne contrôle pas : le courage, la volonté, voire l’héroïsme, obéissent aux pulsions de l’Homme en tunique de peau, pulsions non suffisamment purifiées, lourdes de vanités, de désir de renommée, […] lourdes de volonté de puissance et de gloire. Elles ne peuvent se gérer que dans les catégories du premier étage de l’Arbre et s’inscrire dans des rapports de forces et non d’amour-connaissance [8]. »
La seule manière pour l’être de vaincre « le vieil homme » (l’être identifié à la nature inférieure) pour devenir « l’Homme nouveau » (l’être spirituel incarné) est de se maîtriser soi-même, par l’entretien de la dynamique spirituelle de l’effort suprême, celui de la rectification sans cesse renouvelée de l’attention afin qu’elle se place le plus souvent possible dans « invariable milieu », au niveau du « cœur », symbole de l’équanimité parfaite de la conscience résultant de la conjonction des opposés.
Vincit qui se vincit (Vaincra qui pourra se vaincre).
Quelques citations à méditer
« La décision la plus importante que nous prenons est de savoir si nous croyons vivre dans un univers amical ou hostile. » Albert Einstein
« Le bonheur n’est pas le fruit de la paix, le bonheur, c’est la paix même. » Alain (Émile-Auguste Chartier)
« De celui qui dans la bataille a vaincu mille milliers d’hommes et de celui qui s’est vaincu lui-même, c’est ce dernier qui est le plus grand vainqueur. » Le Bouddha
« Les forces de l’inconscient doivent être surmontées par la conjonction des contraires. Ce sont les noces alchimiques du souffre et du mercure, la “conjonction solis et lunae” des alchimistes. » Auteur anonyme
« La victoire sur soi est la plus grande des victoires. » Platon
« Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne pas devenir monstre soi-même. Si tu regardes longtemps dans l’abîme, l’abîme regarde aussi en toi. » Friedrich Nietzsche
Pratique
Pour se libérer de l’identification à la nature inférieure et permettre ainsi à la conscience de l’être que nous sommes d’être infusée par la lumière de notre nature supérieure, spirituelle, il est nécessaire de comprendre très exactement comment notre part animale fonctionne. Pour cela, j’ai estimé intéressant de vous présenter le point de vue de l’auteur américain Richard D. Carson. Il a écrit un livre axé autour de la compréhension du fonctionnement de la nature inférieure, qu’il appelle métaphoriquement le « Gremlin », en référence aux films mettant en scène de petites créatures diaboliques (les Gremlins) qui sèment le chaos partout où elles se trouvent.
Donner une image de la nature inférieure en se servant d’une créature hideuse, infernale, nous ramène à celle du diable des traditions ou du monstre terrifiant des mythes et des légendes. Dans la mesure où elle crée une division entre la lumière spirituelle et l’âme dans toutes ses dimensions, il est tout à fait fondé de symboliser la nature inférieure de la sorte. C’est la petite voix dans notre tête qui « divise pour mieux régner », sachant pertinemment que si elle ne parvient pas à captiver notre attention, elle n’existe tout simplement pas, raison pour laquelle elle n’a de cesse de la détourner de tout ce qui nous permettrait de devenir pleinement nous-mêmes. Ceci explique aussi pourquoi certaines religions l’appellent l’ « Adversaire » : il est celui qui s’oppose à la Volonté divine, c’est-à-dire à la volonté que l’être que nous sommes vivent la félicité qui découle de l’état d’union avec le réel, ou Dieu si l’on préfère.

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Chapitres supplémentaires :
- La nature du diable intérieur
- Quand l’ennemi devient un ami
- Pensée positive et détachement
- Exercice : la spirale sensorielle
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[1] On observe chez certains animaux la présence d’un mental qui peut potentiellement les rendre névrosé et pervers. C’est le cas par exemple de certains singes, parmi lesquels des comportements qui se rapprochent de ceux des sociopathes ou des psychopathes, ont pu être observés.
[2] Nature humaine et nature divine, Éditions Prosveta, 1996, p. 12.
[3] L’Êtreté, vivre et l’expérience de l’Esprit, Éditions Hélios, 2014, p. 45.
[4] L’Apocalypse de Jean – Un message pour notre temps, Éditions Question de – Albin Michel, 1987, pp. 26-27.
[5] Source : https://youtu.be/wkZVJ8dC4Co
[6] C’est notamment la raison pour laquelle tout ce qui sort du cadre du dogme de la science matérialiste est aujourd’hui discrédité, ridiculisé, voire interdit.
[7] Matthieu 6:24. Voir le cours 25, chapitre « Nul ne peut servir deux maîtres à la fois »
[8] Le symbolisme du corps humain, Éditions Dangles, 1984, pp. 168-169.
- Dernière mise à jour : 27 janvier 2025
- 16:09
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