Le Cours du Vivant

Cours n°27 - La pratique rituelle

La pratique rituelle

Théorie

S’ouvrir à la lumière spirituelle, divine, n’est tributaire d’aucun rituel ni de quelque technique que ce soit. Pour s’en laisser imprégner, il suffit, comme cela a été dit à de nombreuses reprises, de concentrer l’attention de la conscience avec détachement sur la réalité de l’ici et maintenant, qui se présente à nous sous la forme d’un ensemble de phénomènes vibratoires, auxquels appartiennent aussi les pensées produites par la structure mentale ainsi que l’état d’être subtil associé à l’ego.

Toutefois, grâce à la dynamique dans laquelle nous nous plaçons lorsque nous pratiquons un rituel, nous pouvons gagner un temps précieux, en rendant possible la transmutation de la « matière psychique » de l’âme sans avoir à attendre que les aléas de l’existence nous en donnent l’opportunité.

Cette matière psychique à transmuter est ce que j’appelle le double ombrageux. Il est le « plomb psychique » composé de l’ombre intérieure, soit l’ensemble des parts refoulées et blessées de l’âme, ainsi que de la structure mentale mise en place pour les protéger, les occulter ou les compenser.

Cette matière psychique constitutive du double ombrageux ne doit pas être détruite, mais bien transmutée, afin que l’on puisse en faire de l’« Or spirituel » et actualiser ainsi, en soi-même, la présence du Double lumineux, qui est sa nature supérieure, divine.

Les allusions symboliques à une mort de l’ego et à la naissance d’un « Homme nouveau » ne sont donc pas à prendre au pied de la lettre car il n’y a rien à détruire, ou à tuer, mais tout à transmuter, conformément à la célèbre phrase du chimiste Lavoisier, empruntée au philosophe Anaxagore : « Rien ne perd, rien ne se crée, tout se transforme ».

La mort et la naissance doivent simplement être considérées comme un changement d’état d’être, tout comme l’Or spirituel est simplement le plomb psychique qui a été transformé par l’influence de ce qui lui faisait défaut : la lumière spirituelle, que la pratique rituelle permet précisément d’invoquer afin de réaliser cette transmutation alchimique.

Transmuter le karma

Dans la petite enfance, nous vivions en unité avec notre Double lumineux, alignés sur nos élans de vie. Puis, avec la formation du mental, nous avons commencé à discerner ce qui, en nous, nous exposait à l’amour ou au désamour, ou de façon semblable, à l’acceptation ou au rejet, à la reconnaissance ou à l’humiliation, aux louanges ou aux punitions, à la valorisation ou à la dévalorisation, etc.

Dès lors, une division s’est opérée dans notre psyché, avec d’un côté les élans de vie qui étaient « dignes d’être aimés » par le monde extérieur et, de l’autre, tous ceux qui ne l’étaient pas. Au fil des expériences, plus ou moins traumatisantes pour l’être pur et innocent que nous étions dans les premières années de notre vie, la structure mentale s’est renforcée et s’est imposée dans notre propre conscience, à la manière d’un voile qui s’interpose entre l’esprit et l’âme.

Par ignorance, nous nous sommes identifiés à cette structure mentale, perdant de vue notre véritable essence, l’essence lumineuse de l’Esprit. Privés du don d’amour qu’elle représente, certains élans de vie de notre âme se sont vus négligés, voire niés, par l’esprit aveuglé par son identification à la structure mentale. D’un esprit en unité avec l’âme et tout ce qui la compose, nous sommes ainsi passés à un état de conscience identifié à la structure mentale, coupés de toute une partie de notre âme, désormais plongée dans l’ombre.

La paix et la joie d’être, inhérentes à l’état édénique que nous vivions dans le ventre de notre mère et dans les toutes premières années de notre vie, ont progressivement été étouffées par l’identification au voile répressif de la structure mentale, construite autour d’un impératif de défense de l’identité psychologique à laquelle nous avons choisi de nous identifier, perdant de vue notre véritable nature, désormais voilée par cette identité.

C’est ainsi que depuis notre plus jeune âge, à chaque fois que nous avons agi à partir de l’identification à cette structure mentale, nous avons « manqué la cible », nous avons péché, créant du karma dont la conséquence a été la répression ou le refoulement plus ou moins important des élans de vie de notre âme.

L’ensemble du karma généré, ainsi que ses conséquences, forment le double ombrageux. Encore aujourd’hui, à chaque fois que nous réagissons à partir de l’identification à la structure mentale, nous renforçons l’emprise de ce double ombrageux sur nous-mêmes, et donc aussi notre enchaînement à notre karma, comme un automate passant toujours par les mêmes schémas de fonctionnement, les mêmes programmations.

Les élans de vie brimés de l’âme aspirent toutefois à retrouver leur lumière perdue et à la rayonner dans le monde. C’est la raison pour laquelle notre ombre vient régulièrement nous hanter. Lorsque c’est le cas, le conditionnement karmique qui est à l’origine de cette ombre, est immédiatement réactivé et si nous ne sommes pas vigilants, nous nous identifions au réflexe de refus et de rejet produit par la structure mentale, réprimant à nouveau cette ombre et recréant la même conséquence karmique, dont nous aurons à nouveau à revivre la « remontée » dans un futur plus ou moins proche, souvent avec une intensité décuplée.

La vie étant bien faite, le paiement des conséquences karmiques se manifeste au compte-gouttes, chaque jour de notre existence, selon un « plan » parfaitement orchestré. Il est toutefois possible d’accélérer la transmutation du karma et de ses conséquences, c’est-à-dire du double ombrageux formé de la structure mentale et de l’ombre qu’elle maintient prisonnière, cela grâce à la pratique rituelle. En effet, grâce à la dynamique d’ouverture dans laquelle elle nous aide à nous placer, la pratique rituelle permet à la lumière spirituelle d’atteindre les ombres bloquées dans notre inconscient, sans avoir besoin d’attendre que ce soient les circonstances de la vie qui les fassent remonter à la surface.

Cette illumination de nos ténèbres intérieures peut donner lieu à des états d’âme désagréables, qui sont toutefois sans danger. Les éléments ombrageux sont mis en lumière et cette révélation, ce dévoilement, au sens d’une « apocalypse intérieure », n’est pas sans générer quelques remous en effet. Mais comme c’est l’Intelligence suprême de la lumière spirituelle qui est divinement à l’œuvre, tout ce qui est mis en lumière l’est conformément aux capacités d’accueil de la personne qui réalise ce travail de purification intérieure.

Le processus cathartique est progressif et tout ce qui présente une nature trop anxiogène, reste simplement sous le seuil de la conscience jusqu’à ce que la personne soit capable d’en vivre la charge émotionnelle sans entrer en réaction. Ainsi, aucune réactivation karmique ne peut avoir lieu si c’est insurmontable, quand bien même les manifestations sensorielles peuvent être impressionnantes dans certains cas, du fait qu’elles surviennent sans qu’elles aient été réactivées par un stimulus extérieur.

De toute manière, tout ce qui remonte en surface durant l’exécution de la pratique rituelle ou durant les heures qui s’en suivent se serait tôt ou tard manifesté dans l’écoulement de la vie quotidienne, inévitablement. La pratique rituelle ne fait donc que de créer les conditions propices à la libération karmique, sans avoir besoin d’attendre que la vie s’en charge pour nous.

Bien entendu, cette remontée progressive des éléments subconscients est conforme à ce que l’on est capable d’accueillir pour autant que l’œuvre d’illumination soit confiée à la lumière spirituelle, et que l’ego se fasse aussi discret que possible durant la pratique rituelle. 

Qui opère la transmutation ?

Le rituel en lui-même n’a aucun pouvoir. Ce n’est pas le rituel qui agit. Il nous offre simplement un cadre qui nous aide à nous placer dans un état de conscience propice à l’ouverture à la lumière spirituelle.

Par définition, un rituel, dans le contexte de l’ésotérisme, est un ensemble d’actions codifiées fondé sur la foi en l’intervention d’une influence spirituelle à laquelle cet ensemble d’actions contribue à ouvrir celui ou celle qui l’exécute dans les conditions adéquates. Ce qui agit véritablement n’est donc pas le rituel en lui-même, mais cette influence spirituelle qu’il nous aide à invoquer et qui est la seule « force » capable de réaliser l’œuvre d’illumination intérieure.

Les moyens utilisés pour appeler à soi cette influence spirituelle, peuvent différer en fonction de l’appartenance des rituels à telle ou telle tradition, mais le but est toujours le même : l’illumination du chaos intérieur de l’être, c’est-à-dire son double ombrageux.

Dans la pratique rituelle que je vous propose, c’est le son Om qui est utilisé. Comme cela est précisé dans le cours 26 consacrée au Prānava-mantra [1] (« Son primordial »), lorsque vous êtes mentalement focalisé·e sur sa répétition, il se crée au sein même de votre conscience ainsi concentrée, un symbole du Verbe divin, et vous reproduisez alors, à l’échelle microcosmique qui est la vôtre, le Fiat Lux cosmogonique prononcé par l’Esprit de Dieu au commencement de toute chose, et grâce auquel l’ordre fut créé à partir du chaos.

Prononcer le son sacré Om permet donc de faire retentir le symbole du Verbe divin sur le plan individuel et de produire le rayonnement de la lumière spirituelle à l’intérieur de soi.

Afin de rendre le rituel plus spécifique et donc plus efficace, il est possible de cibler l’action de la lumière à l’aide de la visualisation. Par exemple, pour transmuter le double ombrageux, il est possible de le visualiser complètement illuminé tout en associant à cette visualisation la répétition du son Om, dans la conscience que c’est l’Intelligence divine qui opère cette illumination, qui équivaut à une transmutation.

Vous pouvez également associer la répétition du son Om à votre état d’être du moment, ce qui peut s’avérer utile en dehors de la pratique du rituel, dans votre vie de tous les jours, pour obtenir un apaisement émotionnel. À des fins de purification et de régénération, vous pouvez également procéder de la même manière avec d’autres composantes de votre être, comme par exemple les chakras, le système nerveux, l’aura, une tension, un symptôme, etc.

Si le rituel en lui-même n’est doté d’aucune forme de pouvoir, cela vaut aussi pour celui qui l’exécute. Jésus-Christ insista à plusieurs reprises sur le fait qu’il ne pouvait rien faire par lui-même, mais que ses œuvres étaient le fait du Père qui agissait à travers lui. C’est exactement pareil pour vous lorsque vous pratiquez un rituel puisque votre action se limite au fait d’appeler à vous la lumière spirituelle en vous plaçant dans le juste positionnement intérieur.

Sincérité et détachement

Ce juste positionnement est déterminé par la sincérité et le détachement. Ce sont deux conditions principales pour que la lumière spirituelle puisse pénétrer les limites de l’individualité et y réaliser l’œuvre de transmutation. Il faut aspirer sincèrement à vivre cette illumination intérieure, mais sans pour autant être dans l’attente de la forme qu’elle doit prendre, ce qui est loin d’être évident au premier abord.

Beaucoup de personnes se servent des connaissances ésotériques pour obtenir des avantages personnels, pour acquérir une forme de pouvoir sur les autres ou tout simplement pour se débarrasser de ce qu’elles n’aiment pas en elles. Des gens vont même jusqu’à prier dans le but de pouvoir accéder à quelques « paradis » imaginaires ou vont même jusqu’à bénir les autres pour se donner bonne conscience, sans se rendre compte qu’en agissant ainsi de manière intéressée, ils se créent du bon karma, auxquels ils s’attachent [2].

Si nous pratiquons un rituel de purification, si nous prions, si nous pratiquons le Yoga, si nous bénissons les autres ou soi-même, et si nous travaillons sur nous-mêmes d’une manière générale et dans une optique d’Éveil spirituel, cela ne doit pas être pour en tirer des avantages à titre personnel et soulager ou valoriser de ce fait notre « petit moi », mais pour nous placer dans une dynamique favorisant l’épanouissement de notre âme, afin qu’elle puisse refléter ici-bas la lumière spirituelle, le plus parfaitement possible. Il s’agit de faire de notre incarnation un véhicule fonctionnel dont pourra ainsi se servir le pur Esprit pour rayonner sa lumière dans le monde, ni plus ni moins.

La majorité des gens qui s’investissent dans des pratiques rituelles, le Yoga, la méditation, la médiumnité, le chamanisme, ou autre, le font bien souvent avec un intérêt personnel et donc un attachement au résultat, dans le but d’avoir ou de « paraître » plutôt que d’« être ». La démarche est donc biaisée parce que l’ego s’en sert comme d’un moyen pour être reconnu, considéré, admiré, valorisé. Dans une telle démarche compensatoire, les gens sont motivés à fournir des efforts sur eux-mêmes, mais dans l’espoir d’obtenir de tels bénéfices sur le plan personnel, ce qui rend donc leurs efforts intéressés.

Tant que cet intérêt existe, la structure mentale est aux commandes et l’être est dans le contrôle ; le voile ainsi maintenu dans la conscience individuelle, la lumière spirituelle ne peut pas pleinement œuvrer pour la restauration de l’âme, même si les efforts en question sont conséquents.

La personne sincère qui veut vraiment se mettre au service de Dieu doit prendre conscience de cette part d’elle-même qui peut utiliser la spiritualité et le développement personnel pour servir ses intérêts, et y renoncer autant que possible.

Si nous nous engageons sur le sentier spirituel pour servir les intérêts de l’ego séparé, nous le faisons alors pour de mauvaises raisons. Il peut certes être attrayant de gagner en assurance et en estime de soi, d’acquérir un certain magnétisme personnel, une certaine clairvoyance et un certain pouvoir de fascination sur les autres par le charisme que nous pouvons développer en pratiquant certaines techniques, mais si ces capacités ne sont pas mises au service de l’Esprit, elles s’avèrent nuisibles, tant pour soi-même que pour les autres.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle toutes les grandes traditions mettent en garde contre l’acquisition des pouvoirs psychiques de même que contre l’attachement aux fruits de nos actions, auxquels elles invitent à renoncer le plus tôt possible, sachant que l’une comme l’autre risquent d’être des obstacles à l’Éveil spirituel.

Ceci dit, le détachement du résultat et le désintéressement personnel ne doivent pas être vus comme une forme de négligence envers soi-même pour autant. « Charité bien ordonnée commence par soi-même », comme le dit avec sagesse le proverbe médiéval.

Le pur Esprit en nous veut que nous prenions soin de notre incarnation, non pas pour en tirer des avantages personnels, mais pour qu’il puisse s’en servir pour irradier son amour infini jusque dans les plans les plus denses de la matière. Pour cela, il faut évidemment que nous soyons en pleine possession de nos moyens, ou tout du moins en bonne santé et aussi libérés que possible des croyances limitantes, des névroses, des inhibitions, des complexes, etc. Pour servir le Divin en soi, il faut être aussi bien dans sa peau que possible, cela tombe sous le sens. Le corps (et l’âme plus globalement) est le temple de l’Esprit, ne n’oublions pas !

Nous avons donc à nous soucier de notre âme, en prendre soin, non pas pour soi-même même s’il est évident que nous en profiterons aussi, mais pour favoriser le règne de l’Esprit.

Le détachement du résultat et le désintéressement personnel, c’est faire ce qui est juste et bon pour l’âme vivante, pour la seule satisfaction de faire la Volonté divine. Dans la justesse d’une telle dynamique, la satisfaction que l’on ressent alors est tout à fait légitime, et nous pouvons être fiers d’être de dignes serviteurs de l’Esprit, à la condition toutefois de ne pas s’attacher là non plus à ce sentiment de fierté.

Cette volonté d’œuvrer pour le bien suprême de l’âme, efforts justes (donc détachés et désintéressés) à l’appui, nous place dans la dynamique de la perfection spirituelle, qui génère en nous la haute vibration de l’amour christique, universel.

Quelques citations à méditer

« Vouloir, c’est bien ; mais continuer à vouloir, c’est mieux. La persévérance dans l’effort est seule vraiment efficace. » Jean Desvigne-Rouge

« La plus belle œuvre que l’on puisse demander à l’homme, c’est de faire effort pour se réaliser tel qu’il se conçoit, c’est-à-dire de devenir ce qu’il est en puissance, d’exprimer son vrai moi. » Dr. Victor Pauchet

« Le succès n’est pas ce qui importe ; ce qui importe, c’est l’effort, car c’est là ce qui dépend de l’homme, ce qui l’élève, ce qui le rend content de lui-même. » Théodore Simon Jouffroy

« Une demi-heure de méditation est essentielle sauf quand on est très occupé. Alors une heure est nécessaire. » Saint François de Sales

Pratique

La pratique rituelle que je vous propose dans les pages qui suivent est inspirée d’une série de trois exercices tirés de l’ouvrage Le Flambeau d’Unité, du Maître Hamsananda. Dans leur version première, ces exercices comportaient des mantras composés de bījas spécifiques, que j’ai choisi de remplacer par le son sacré Om, sans perte d’efficacité compte tenu de la puissance spirituelle du Om qui, en tant que Prānava-mantra (mantra primordial), contient tous les autres mantras en lui. Le travail plus spécifique que les mantras de la version d’origine étaient censés accomplir sera, dans cette version-ci, spécifié par votre intention, formée par la visualisation et la conscience de l’effet souhaité. 

Notez aussi que, par rapport à la version d’origine, celle que je vous propose dans les pages qui suivent est dépourvue de toute notion d’anéantissement ou de destruction de votre double ombrageux. S’il est question d’un feu purificateur ou d’une épée flamboyante, c’est pour symboliser le travail spécifique de la lumière spirituelle, ce « feu d’en haut » qui vise à transmuter, purifier, régénérer votre nature inférieure, au sens où l’exprime la formule latine Igne Natura Renovatur Integra (I.N.R.I.) : « La nature est intégralement renouvelée par le feu. »

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Chapitres supplémentaires :

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[1] Voir le cours 26, chapitre « Parallèle entre le Christ et le Om ».

[2] Voir le cours 23, chapitre « Les trois types de karma ».