Le Cours du Vivant

Cours n°11 : Respiration et souffle vital
Respiration et souffle vital
Théorie
Comme vous avez pu vous en rendre compte en étudiant les deux précédents cours, je considère que le corps occupe une place importante dans la quête spirituelle.
Si certaines philosophies et certains courants mystiques ou religieux voient la dimension matérielle comme un obstacle qui empêcherait l’être de se réaliser spirituellement, en ce qui me concerne, je pars du principe qu’elle est au contraire un levier grâce auquel nous pouvons réaliser l’éveil de l’âme.
Le but n’est pas de basculer dans le matérialisme en considérant l’attention accordée au corps comme une fin en soi, mais de la considérer comme un moyen de réaliser cet idéal supérieur qu’est l’éveil de l’âme.
La raison en est la suivante : en prenant appui sur le corps, l’esprit entre directement en contact avec l’âme, cela par analogie et par voie réflexe étant donné que le corps est à la fois le symbole de l’âme et sa porte d’accès par le système nerveux.
À travers le corps, l’esprit peut donc directement influencer l’âme, et vous avez sans doute d’ores et déjà pu en faire le constat en pratiquant les exercices de pleine conscience focalisée sur les différentes parties du corps, avec des effets tangibles au niveau de votre état émotionnel.
À l’échelle collective comme à l’échelle individuelle, rien n’est séparé de rien ; tout est interrelié et en interaction permanente. L’esprit, l’âme et le corps forment un tout, une unité « spirituo-psycho-somatique », si vous me permettez l’usage d’un tel néologisme.
L’influence somato-psychique
Comme nous l’avons vu, les pensées, de même que les émotions et les comportements d’un individu, peuvent être influencées par la dimension corporelle.
Par exemple, des affections du système nerveux, quelles qu’en soient les causes, peuvent engendrer des réactions psychiques névrotiques. De même, un mauvais équilibre du microbiote intestinal peut influencer l’humeur et être à l’origine de certaines maladies psychiques.
La relaxation musculaire peut modifier le rythme cérébral et « calmer » le mental. À l’inverse, des crispations musculaires peuvent réduire l’amplitude respiratoire et priver le cerveau de l’oxygène dont il a besoin pour fonctionner normalement, générant de la fatigue, un manque de lucidité, de l’anxiété, de l’agitation, de l’irritabilité et des baisses de concentration.
La culture physique retentit positivement sur la psyché, en développant certaines qualités telles que la confiance en soi, le courage, la pugnacité, etc.
La posture du corps modifie les états d’âme et donc aussi l’état d’esprit, d’où l’intérêt de certaines voies spirituelles comme le Hatha Yoga [1] et l’usage de la technique des mudrās [2] dans la tradition hindoue. S’agenouiller et regarder le ciel les mains jointes contre le cœur, rendent humble face à une Intelligence ou un Mystère qui nous dépasse, ouvrent au « sacré » et déclenchent instantanément l’élan de prier, cela même pour une personne athée, du fait de la symbolique que revêt cette posture dans l’inconscient collectif.
Dans un autre registre, mais tout aussi symbolique, le soin accordé à l’apparence physique du corps et à l’image qu’il renvoie ainsi que la tenue vestimentaire [3] sont autant de facteurs qui rejaillissent positivement ou négativement sur la psyché.
Enfin, je terminerai cette liste non exhaustive d’exemples en citant l’influence qu’exerce l’alimentation [4] sur la psyché selon sa qualité nutritive et vibratoire, au même titre que certaines substances telles que les plantes, les champignons et les drogues, qui peuvent fortement modifier l’activité mentale et le comportement de l’individu, par les substances chimiques qu’elles libèrent dans le sang et leurs effets sur les fonctions biologiques.
La fonction du système nerveux
Si le corps est susceptible d’influencer la psyché (soit l’âme, pour rappel, dans toutes ses dimensions : mentale, émotionnelle, énergétique, etc.), comme en témoignent ces nombreux exemples, c’est par l’intermédiaire du système nerveux que cette influence opère.
Comme nous l’avons vu, cette influence joue aussi en sens inverse : les pensées produites par la psyché agissent sur les neurones (les cellules cérébrales) qui envoient des influx nerveux électriques à travers la moelle épinière puis à travers les milliards de nerfs jusqu’aux portes sensorielles, où elles se manifestent sous la forme de sensations (les émotions), plus ou moins fortes selon la nature des pensées, et plus ou moins fortes également selon le degré de relâchement ou de crispation des muscles, l’état de tension musculaire étant de nature à inhiber [5] les sensations.
Ainsi, nous pouvons considérer que le système nerveux est le système biologique de notre être qui joue le plus grand rôle dans la transmission des informations entre le corps et l’âme, dans un sens comme dans l’autre.
Comme le système nerveux forme le lien le plus direct avec la psyché, c’est donc son état de santé qui doit être recherché en priorité lorsque nous considérons le corps comme point d’appui permettant d’influencer positivement la psyché, et c’est par la fonction respiratoire que ce résultat peut être obtenu le plus efficacement et le plus rapidement.
Comme je l’ai indiqué, plus le système nerveux est perturbé, affecté, déséquilibré, plus l’influence de la structure mentale est forte. Dans de telles conditions, l’être est pris dans la spirale infernale des réactions conditionnées et il lui est d’autant plus difficile de tenir les rênes de l’individualité et donc de garder le cap dans une direction qui participe à l’éveil de l’âme. À l’inverse, plus le système nerveux est équilibré et sain, plus l’être est à même de rester calme et lucide, afin de prendre les décisions qui s’imposent en vue d’aider l’âme à s’épanouir.
Dans l’absolu, comme l’essence de l’esprit ne peut être altérée par le « milieu » psychique et physique, il est potentiellement possible de rester maître de soi en maintenant la conscience individuelle parfaitement équanime, en toutes circonstances, même dans le cas où le corps présente un état de dégénérescence avancé.
Ce degré ultime de maîtrise de soi ne peut être que le résultat d’une longue ascèse ayant permis la libération graduelle de cette tendance mentale à réagir sur la base des impulsions contraires du désir et de l’aversion. Cela dit, si cet état de maîtrise parfaite de soi-même peut être atteint comme en témoigne la vie de certains maîtres spirituels, l’enseignement dispensé dans le Cours du Vivant ne vise pas la recherche de cette capacité tout en laissant le corps dans un piteux état.
Je pars du principe qu’il est en effet bien plus aisé de travailler à la maîtrise de soi si l’on ne se sent pas trop mal dans sa peau, donc dans son corps, et d’autant plus encore si ce corps fonctionne de manière optimale de manière à pouvoir transmettre dans ces conditions des signaux « positifs » à la psyché, contribuant à l’élever à des hauts niveaux de confiance, de bien-être, de paix, d’inspiration, de lucidité, d’intelligence, etc.
De plus, si la voie de l’épanouissement de l’âme réside dans le service à autrui ou dans des activités créatrices pour lesquelles le corps est mis à contribution, on comprendra aisément qu’il vaille mieux que ce corps fonctionne le mieux possible.
Étonnamment, lorsqu’il s’agit d’identifier et de traiter les dysfonctionnements du corps, la médecine moderne s’intéresse surtout au sang et aux organes, et néglige le système nerveux alors que c’est pourtant à son niveau que la maladie manifeste ses premiers signes dans la dimension physique. En effet, avant de se communiquer au sang puis en dernier lieu aux organes, la maladie se manifeste par un déséquilibre du système nerveux, déséquilibre causé par une production insuffisante d’influx nerveux électrique.
D’une manière générale, nous pouvons considérer que la maladie apparaît toujours en premier lieu dans les dimensions les plus subtiles du corps, soit au niveau électrique, et qu’elle se propage ensuite progressivement dans les dimensions les plus denses, jusqu’à impacter en tout dernier maillon de la chaîne les parties les plus matérielles de l’individualité, soit les organes physiques. Sur le plan physique, ce déséquilibre qu’est la maladie apparaît donc en premier lieu dans le système nerveux, la modalité la plus subtile du corps.
La métaphore des poupées russes
Si les dysfonctionnements du système nerveux constituent les causes de la maladie sur le plan physique, ils ne sont eux-mêmes la plupart du temps que la conséquence de déséquilibres apparaissant à un niveau encore plus subtil, non observable par les instruments de la science officielle étant donné qu’ils sont situés dans les dimensions psychiques de l’individualité, soit au niveau des pensées et des émotions, tant sur les plans conscients que subconscients.
Bien sûr, les effets des pensées et des émotions sont clairement observables en tant qu’ensemble de phénomènes physiques dans le cerveau, dans le système nerveux et dans le sang. Mais d’une certaine manière, ces effets ne représentent que la partie émergée de l’iceberg : ils ne sont que la manifestation visible de phénomènes invisibles qui leur sont intimement reliés et avec lesquels ils entretiennent une relation de cause à effet.
Reprenons la métaphore des poupées russes imbriquées les unes dans les autres (voir illustration ci-après). La poupée la plus extérieure symbolise la dimension corporelle, tandis que la poupée la plus intérieure représente l’esprit. Comme nous l’avons vu, entre ces deux « extrêmes », il existe plusieurs poupées qui sont à l’image des multiples dimensions de l’âme ; elles sont autant d’intermédiaires faisant la liaison entre le corps et l’esprit.

La dimension spirituelle est la plus centrale de l’être. C’est l’esprit ainsi que le reflet lumineux qu’il crée en l’âme vivante, sous la forme de la conscience individuelle. C’est au niveau de cette dernière que prennent racine toutes les causes, qui se manifesteront « en cascade » au sein des dimensions psychiques, des plus subtiles aux plus denses, jusqu’à se « matérialiser » en dernier lieu dans le corps.
Le cerveau lui-même, en tant que structure physique, n’est pas le « donneur d’ordre », mais le « vecteur » de la pensée sous la forme d’impulsions électriques transitant par le système nerveux jusqu’aux portes sensorielles, comme nous l’avons vu plus haut.
Les pensées, inhérentes à la sphère mentale, existent donc indépendamment du cerveau, même si celui-ci en traduit très exactement la nature sur le plan physique par l’intermédiaire du système nerveux.
Conscience et cerveau
Logiquement, si le cerveau n’est pas producteur des pensées, il n’est pas non plus à l’origine de l’esprit, bien qu’il nous en donne l’impression puisque c’est à son niveau que le phénomène de la conscience apparaît, au centre de l’encéphale pour être tout à fait précis, là où se situe la glande pinéale, aussi appelée épiphyse.
Dans l’un de ses ouvrages traitant du phénomène de l’extase mystique, Érik Sablé a très bien exposé la vision réductrice d’une grande partie de la communauté scientifique à l’égard du lien entre la conscience et le cerveau :
Pour les scientifiques matérialistes, « les expériences mystiques seraient produites par l’activation ou non de certaines zones cérébrales. Ce serait une simple affaire de neurones.
En fait, ces scientifiques ont inversé le problème. S’il est certain que les états mystiques induisent une réaction au niveau des neurones et des échanges de neurotransmetteurs entre synapses, détectables grâce à l’imagerie cérébrale, cela n’implique nullement que le cerveau les génère. Nous pouvons tout aussi bien considérer que ce sont au contraire les états mystiques qui activent ou suspendent certaines zones cérébrales.
Lorsque nous manipulons un poste de télévision, nous agissons sur l’image et nous pourrions en déduire qu’elle est produite à l’intérieur du poste. Or, nous savons bien que l’émission se passe ailleurs. Le poste n’est qu’un transmetteur, un décodeur. Rien de plus. Il en est sans doute de même pour le cerveau. […]
C’est donc le préjugé matérialiste qui fait du biologique la réalité première. Et l’on peut aussi bien considérer que la “matière” est seconde par rapport à “l’esprit”, comme les saints, les maîtres, les adeptes de toutes les religions l’ont expérimenté et enseigné depuis la nuit des temps [6]. »
Émotions et maladies psychosomatiques
Pour revenir au système nerveux, il n’est lui-même que le « transmetteur » sur le plan physique d’énergies beaucoup plus subtiles circulant dans les canaux d’un système énergétique complexe composé d’une multitude de canaux appelés méridiens ou nādīs [7], dont le tracé correspond en grande partie à celui des millions de ramifications nerveuses qui existent dans tout le corps.
Ainsi, lorsqu’une émotion se manifeste sous la forme de substances biochimiques dans le sang et de contractions musculaires, ce n’est là que la manifestation au niveau physique d’une énergie apparue préalablement dans l’anatomie subtile de l’âme.
Si les instruments de mesure utilisés par la science officielle ne sont pas (encore) capables [8] d’observer les énergies les plus subtiles circulant dans la dimension psychique, certains clairvoyants le peuvent, eux. Elles apparaissent à leur « troisième œil » sous la forme de « bulles » ou de « nuages » plus ou moins colorés et plus ou moins denses en fonction de la nature de l’émotion.
Les émotions dont le taux vibratoire est bas sont celles qui traduisent de la culpabilité, de la tristesse, de la peur ou de la haine. Elles vont se manifester aux perceptions extrasensorielles des clairvoyants sous la forme de couleurs ternes et sombres, alors que les émotions fluides dont le taux vibratoire est élevé, comme la joie par exemple, leur apparaîtront sous des aspects beaucoup plus colorés et éthérés.
Aussi, les magnétiseurs et les guérisseurs peuvent ressentir des sensations différentes en passant leurs mains sur le corps d’un individu, selon qu’elles sont au contact d’énergies circulant avec fluidité ou d’énergies bloquées par répression émotionnelle ou encrassement du terrain biologique.
L’émotion, au sens étymologique [9], exprime l’idée d’un mouvement. Cela est particulièrement flagrant chez un petit enfant, dont l’émotion est systématiquement accompagnée de mouvements corporels, ceux-ci étant pour lui le seul moyen de se faire comprendre par son entourage jusqu’à ce que son mental soit suffisamment développé et qu’il puisse utiliser le langage verbal.
Qu’il s’agisse de la tristesse ou de la joie, toutes les émotions se manifestent sur le plan physique par des substances biochimiques et par le jeu de contractions musculaires imprimant un mouvement au corps, mouvement qui doit être librement vécu pour qu’il y ait équilibre, donc aussi unité, harmonie et santé.
Je fais remarquer que la contraction musculaire sert ici à engendrer le mouvement, et non à contenir ce même mouvement, comme c’est le cas lorsque l’être est identifié à la structure mentale et qu’il réprime ou refoule ce qui se passe en lui-même. Dans un tel état de conscience, l’être empêche ce mouvement de se produire librement, d’une part pour anesthésier la sensation et échapper au mal-être émotionnel et, d’autre part, pour éviter que les émotions ne soient visibles et qu’il soit susceptible d’être jugé par le monde extérieur, échappant ainsi à la peur de revivre un sentiment de honte et de culpabilité.
Dans l’absolu, il n’y a pas d’émotion bonne ou mauvaise, positive ou négative, agréable ou désagréable. L’émotion ne devient problématique que lorsqu’elle est dirigée sur les autres ou bloquée par répression, qu’il s’agisse de la colère, de la peur, de la tristesse et même de la… joie ! Lorsque les émotions sont vécues librement, elles ne sont jamais « mauvaises » ni même désagréables.
La maladie dite psychosomatique apparaît en tant que conséquence du refus de l’émotion [10], par interdit moral. Lorsqu’elle n’est pas extériorisée par le mouvement ou transmutée par le ressenti équanime des sensations qu’elle engendre, l’émotion se fige et stagne à certains endroits du corps, ce qui a pour effet d’entraver la circulation fluide des influx nerveux électriques et de perturber la physiologie du corps.
Cette entrave de l’énergie électrique constitue la toute première cause de la maladie psychosomatique au niveau physique. Elle provoque une modification du sang, qui engendre à son tour des troubles organiques.
L’importance du souffle vital
De même que l’électricité circulant dans le système nerveux est la substance la plus essentielle pour le maintien de l’équilibre dans le corps, le souffle vital – le fameux prāna de la tradition hindoue –, capté à l’inspiration, est la substance la plus essentielle pour l’âme.
De ce point de vue, nous pourrions considérer que le souffle vital est à la dimension psychique ce que l’électricité nerveuse est à la dimension corporelle. L’électricité nerveuse et le souffle vital sont deux formes d’électricité analogues, la première étant simplement plus « condensée » que la seconde, qui est quant à elle beaucoup plus subtile et « éthérée ».
En plus de la lumière spirituelle directement véhiculée par l’attention pure de l’esprit, le système nerveux puise l’énergie vitale dont il a besoin pour fonctionner harmonieusement à partir du souffle vital, en la transformant en électricité nerveuse. En cela, nous pouvons comprendre le rôle fondamental que joue la respiration dans l’équilibre physique et psychique. Sans le souffle vital, le système nerveux ne peut tout simplement pas fonctionner harmonieusement, car il lui manque l’élément essentiel dont il a besoin pour émettre et diffuser l’électricité dont les processus physiologiques dépendent.
Sur le plan purement physique, la respiration apporte également de l’oxygène, dont le corps a besoin pour produire l’énergie biologique par combustion (ou oxydation) du glucose provenant de la digestion des aliments, combustion produite grâce au dioxygène au niveau de la cellule directement (des mitochondries plus exactement).
Voici une excellente définition du souffle vital (prāna), issue de la revue Yoga et Vie [11] :
« Le prāna est non seulement l’énergie créatrice à l’origine de l’univers, mais également la source des courants et des flux énergétiques initiant et impulsant le monde de la manifestation et des phénomènes. Il est le moteur des cycles et des rythmes de la nature, des processus physiologiques de l’homme. […]
Cette énergie vibratoire, par sa puissance, déclenche les processus énergétiques à l’origine de la création. Avec le monde créé se produit le passage de l’un au multiple, du non-manifesté au manifesté, de l’unité à la pluralité. Cette énergie créatrice est le prāna. En se diffusant, l’expansion du prāna assure la cohésion de tout ce qui participe à l’apparition du temps et de l’espace. Émanant directement d’une unique source, le prāna assure l’ordonnancement parfait du cosmos [12], donnant ainsi toute son exigence au respect de la loi, naturelle et universelle, le Dharma. »
Le souffle vital est le principe vital qui sous-tend l’existence manifestée sous toutes ses formes. Il est le principe centralisateur et ordonnateur de la vie. En tant que principe à l’origine de la Création, il ne s’y limite pas. Il est hors de l’espace et du temps, mais il peut se décliner sous différentes formes, en passant de la puissance à l’acte, c’est-à-dire en passant de l’énergie potentielle à l’énergie manifestée, créée.
C’est précisément ce passage de l’incréé au créé qui se produit au moment de l’inspiration ; à cet instant précis, le souffle vital passe du non-manifesté au manifesté ; il pénètre dans la dimension psychique et lui confère la vie ; il l’anime.
« L’Éternel Dieu forma l’homme de la poussière de la terre, il souffla dans ses narines un souffle de vie et l’homme devint une âme vivante. » Genèse 2:7
Si l’existence de l’être en tant qu’âme vivante est tributaire du souffle vital, nous pouvons en déduire que la quantité de souffle vital qui pénètre l’âme dans toutes ses dimensions détermine son degré de vitalité.
Plus l’être est capable de faire circuler librement et abondamment le souffle vital en l’âme vivante, plus il tend vers l’éveil de sa nature sous la forme de l’unité, la cohésion, l’harmonie, l’équilibre, la joie, la maîtrise, l’inspiration, l’enthousiasme, la confiance, la beauté, la santé, etc. ; en revanche, moins il en est capable, plus il manifeste les aspects opposés de ces qualités, tendant vers le chaos, l’anarchie, la maladie et la mort. C’est pour cela que la médecine traditionnelle chinoise, fondée sur la philosophie taoïste, s’intéresse avant toute chose à rétablir la circulation du souffle vital, qu’elle appelle chi.
Selon une formule empruntée à cette philosophie taoïste, il est dit que « l’homme existe dans le chi, et que le chi réside à l’intérieur de l’homme ». Dès lors, celui qui est capable de s’ouvrir à cette énergie cosmique et de la faire circuler en lui-même de façon extrêmement fluide devient une image parfaite du cosmos lui-même, donc une unité individuelle, à l’image de l’unité universelle, divine ; un microcosme à l’image du macrocosme…, selon la philosophie hermétique.
C’est ainsi que l’être qui vit en phase avec le mouvement de la vie (imprimé par le souffle vital) en arrive à « agir sans agir », pour reprendre la formule (wei-wu-wei), bien connue de la philosophie taoïste.
Souffle vital et système nerveux
Sur le plan physique, la toute première action du souffle vital est la génération de l’énergie nerveuse, de nature électrique, dont elle est la forme d’énergie vibratoirement la plus élevée de la dimension corporelle.
Cette production se fait au niveau de la colonne vertébrale, où se situent, sur le plan de l’anatomie subtile de l’âme, les canaux d’énergie (nādīs), nommés idā et pingalā. En s’écoulant à l’intérieur de ces canaux d’énergie, le souffle vital stimule le système nerveux situé au niveau de la moelle épinière, qui active la chaîne de ganglions nerveux, qui à son tour transmet les fluides électriques à l’ensemble du corps par un réseau de milliards de nerfs ; un réseau si vaste et dense qu’il n’existe pas une parcelle de peau que l’on ne puisse piquer avec la pointe d’une aiguille sans qu’on en sente les effets !
Mais les influx nerveux électriques produits par le souffle vital suivent également un trajet en sens inverse, de la moelle épinière jusqu’au cerveau [13], où ils activent les cellules cérébrales (neurones), stimulant harmonieusement l’activité de la pensée à ses plus hauts niveaux de créativité et d’inspiration. Comme le disait Swāmi Sivānanda : « L’énergie cosmique (prāna) est le revêtement du mental ; la vibration du prāna psychique est à l’origine de la formation de la pensée. Par la discipline de la respiration, vous pouvez rendre le mental plus stable [14]. »
Quelques citations à méditer
« Purifier le système nerveux renforce la domination de l’esprit sur la matière. » Otoman Ha’Nish
« Le souffle est la monture de l’esprit. » Sagesse bouddhiste
« Sans maîtrise de la respiration, rien ne peut être maîtrisé. » Georges Gurdjieff
« Aux Indes, il est dit que celui qui sait contrôler le prāna, ce pouvoir omniprésent en lequel toutes les énergies comme l’électricité, le magnétisme, la gravitation, la cohésion, prennent leurs origines, celui-là contrôle toutes les forces de l’Univers. » Hamsananda
« La façon dont vous respirez est presque aussi cruciale que l’acte même de respirer. » Stephen Russel
« Souffle vital des Dieux, germe de l’Univers, ce Dieu Vāyu va où bon lui semble ; on l’entend qui murmure, mais lui, on ne le voit pas. » Rig-Veda
« La science du souffle est la plus haute de toutes les sciences : c’est une flamme pour illuminer la demeure de l’âme. » Philosophie hindoue
Pratique
Pour optimiser l’absorption du souffle vital sur tous les plans et ainsi profiter de ses multiples bienfaits, il convient d’être conscient qu’il est présent en quantité illimitée dans l’espace silencieux et immobile qui constitue la trame de tout le vivant, et qu’il « infuse » la psyché autant que le corps à chaque respiration. Sans cette conscience du souffle vital, l’âme et le corps bénéficient seulement de l’échange entre l’oxygène et le gaz carbonique produit par la respiration « mécanique ». Si cela est certes déjà bénéfique puisque cela profite au sang et aux fonctions organiques, c’est toutefois largement insuffisant si l’on veut éveiller les centres psychiques (chakras), purifier l’anatomie subtile et vivifier l’ensemble du système nerveux.
Être conscient que cette énergie cosmique s’imprègne en soi à chaque respiration n’est toutefois pas encore suffisant, car il faut également que la respiration soit la plus naturelle et profonde possible. En effet, si l’on est conscient du souffle vital mais que l’amplitude de la respiration est fortement réduite par des crispations musculaires et des encrassements de la sphère pulmonaire, on s’empêche de recevoir tout ce potentiel auquel on a droit sans condition et en abondance, ce qui serait bien dommage, vous en conviendrez…

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Chapitres supplémentaires :
- Bien respirer pour mieux vivre
- Libérer la respiration
- Exercice : conscience du souffle vital
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[1] Voir le cours 13.
[2] « Mudrā est un terme sanskrit […] qui désigne une position codifiée et symbolique des mains d’une personne (danseur, yogi) ou de la représentation artistique (peinture, sculpture) d’un personnage ou d’une divinité. L’origine des Mudrās est très ancienne et se rattache à la culture védique. » Mudrā. (2024, 26 août). Dans Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/wiki/Mudrā
[3] Contrairement à ce que dit l’expression populaire, si « l’habit ne fait pas le moine », il y contribue fortement.
[4] L’alimentation est l’un des vecteurs principaux de programmation de l’inconscient, et il est donc tout particulièrement conseillé de bénir ses repas et de choisir précautionneusement ses aliments, de préférence naturels, biologiques et locaux.
[5] La crispation musculaire fait partie du réflexe névrotique destiné à rendre les sensations subconscientes, pour ne plus les ressentir et ne plus en souffrir.
[6] Anthologie sur l’Illumination spirituelle, Éditions Dervy, 2006, pp. 18-20.
[7] Voir le cours 12, chapitre « Les nādīs et le caducée d’Hermès ».
[8] En vérité, de tels instruments existent déjà mais la science officielle ne reconnaît pas que les phénomènes qu’ils permettent d’observer puissent appartenir aux dimensions subtiles de l’être. Je citerai par exemple le procédé découvert (« accidentellement », comme beaucoup de découvertes scientifiques…) par les époux Kirlian, qui permet de photographier le champ d’énergie du corps (et non pas l’aura, contrairement à ce que l’on croit). Il est déplorable que la science officielle ne cherche pas plus à faire le lien entre les images obtenues par de tels procédés et les connaissances relatives à l’anatomie subtile de l’être. Des recherches dans ce domaine pourraient aider à identifier les causes des troubles physiques avant qu’elles ne se « cristallisent » sur ce plan-là, évitant ainsi des opérations chirurgicales et des traitements médicamenteux aussi lourds qu’inutiles pour ceux qui doivent les subir puisque l’on pourrait agir en amont, en traitant la maladie sur le plan psychique directement. Mais en laissant la cause psychique se manifester sous la forme de troubles physiques, on peut traiter ces derniers, ce qui est beaucoup plus intéressant d’un point de vue financier. Si l’on admet l’existence des collisions d’intérêts entre la communauté scientifique et l’industrie pharmaceutique, peut-être est-ce là l’une des raisons pour lesquelles ces recherches n’intéressent pas la science officielle.
[9] Du latin ex movere, qui signifie « bouger hors de ».
[10] Les personnes qui projettent systématiquement leurs émotions sur les autres sont en principe en bonne santé, aussi malveillant et pervers que puisse être leur comportement, contrairement à ceux qui ne font aucun mal à autrui, mais qui gardent tout en eux et qui se font par conséquent beaucoup de mal à eux-mêmes. Parmi toutes les maladies traitées aujourd’hui, on estime que plus de la moitié sont d’origine psychosomatique, et que 90 % d’entre elles seraient aggravées par des émotions bloquées.
[11] Numéro 145, septembre 2010.
[12] Du grec kosmos signifiant « bon ordre », « ordre de l’univers ».
[13] Sur le plan de l’anatomie subtile, occulte, ce mouvement ascensionnel de l’énergie vitale se fait dans le canal d’énergie central sushumnā, à l’intérieur duquel sont alignés les chakras majeurs. Ces centres d’énergie subtils sont plus ou moins « éveillés » selon la quantité d’énergie vitale passant au travers d’eux. Lorsqu’ils sont complètement ouverts et épanouis, on parle d’éveil total de l’énergie vitale (ou d’éveil de la Kundalinī).
[14] Pratique de la méditation, Éditions Albin Michel, 1950, p. 119.
- Dernière mise à jour : 19 janvier 2025
- 15:34
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